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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 22.djvu/694

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les étoiles proches parmi les autres et fournit indirectement une mesure de leurs distances au Soleil.

Quelques chiffres montreront que ces déplacemens sont toujours bien petits : la parallaxe de l’étoile la plus rapprochée de nous dans l’hémisphère boréal (elle s’appelle 21 185 Lalande, ce qui est un nom bien peu poétique pour une étoile aussi intéressante) est d’environ une demi-seconde d’arc. C’est l’angle sous lequel on verrait un objet d’un mètre de diamètre placé à 430 kilomètres de distance, ou encore c’est l’angle sous lequel on verrait un objet d’un millimètre placé à 430 mètres. C’est donc un angle très petit et on imagine quelle doit être la précision des mesures astronomiques pour déceler sans erreur des quantités aussi faibles. Sur les clichés de la carte du ciel un tel angle ne correspond qu’à un cent-vingtième de millimètre environ, et il faut des microscopes micrométriques spéciaux pour le mettre en évidence.

Étant donné que cet angle est beaucoup plus petit encore à mesure qu’il s’agit d’étoiles plus éloignées on conçoit qu’on n’ait pu mesurer directement jusqu’ici que les parallaxes de quelques centaines d’étoiles tout au plus. Pour les autres on a des procédés indirects et donc moins sûrs. La plus rapprochée est a du Centaure dans l’hémisphère austral qui n’est guère qu’à 41 trillions de kilomètres de nous, c’est-à-dire à deux pas, astronomiquement parlant.

La mesure des parallaxes par la photographie a d’ailleurs reçu récemment une application très importante et inattendue, à la suite de la découverte de la curieuse planète Eros. On sait qu’entre Mars et Jupiter circulent tout un essaim de petites planètes dont j’entretiendrai quelque jour mes lecteurs et qui d’après certains seraient les débris d’une ancienne grosse planète éclatée. Quoi qu’il en soit, les découvertes de ces astéroïdes se multiplient, on en trouve bon an mal an quelques douzaines, et les astronomes n’en sont généralement guère enchantés, car il faut calculer leur orbites, ce qui est fastidieux et ne conduit généralement qu’à ce résultat prévu : que toutes ces petites planètes se ressemblent comme des sœurs et suivent monotonement la même carrière.

Il en fut tout autrement, lorsqu’en 1898 l’astronome allemand Witt découvrit l’astéroïde baptisé par lui Éros. On constata en effet bientôt que son orbite a cette particularité d’être très excentrique, tellement excentrique qu’à un moment donné elle coupe l’orbite de Mars, si bien qu’Éros se trouve être à un moment de sa course plus rapproché de la Terre que Mars ou Vénus, à qui il enlève ainsi le privilège d’être notre