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Ces nouvelles désastreuses furent immédiatement transmises à la Reine. Le gouvernement bolonais tient ses séances au deuxième étage du palais Leuchtenberg, juste au-dessus de notre appartement. Elle savait que ces bonnes gens, sans aucune expérience des affaires, avaient la tête perdue de tout ce qu’il leur arrivait ; que les bourgeois d’Ancône demandaient une capitulation ; qu’Armandi, n’apercevant aucune issue, était disposé à traiter avec le Saint-Siège. Il avait heureusement, sous la main, pour pouvoir le faire, le cardinal Benvenuti, légat a latere qui, par décret spécial de la Providence, se trouvait être son prisonnier depuis quelques jours.

Les Autrichiens s’efforçaient de leur côté d’amener un dénouement pacifique en répandant une proclamation aux termes de laquelle une amnistie entière était promise aux insurgés, en échange du dépôt de leurs armes. Etaient seuls exceptés de cette mesure bénévole le général Zucchi et le prince Louis, qui devaient être fusillés aussitôt que pris.

Comme si ce n’était pas assez de cette menace, il a fallu que le prince fût attaqué hier soir d’un violent mal de tête ; la Reine a fait dresser pour lui un lit dans son boudoir. Un jeune docteur, découvert par Charles, n’a su qu’ordonner un bain de pieds et réserver son diagnostic. Mais, ce matin, M. Bendoni nous amène son médecin qui reconnaît la rougeole au premier coup d’œil. Toute sortie est interdite, il faut couvrir le malade et le faire transpirer. On devine l’émoi de la Reine. Les Autrichiens aux portes ! son fils paralysé par le mal ! Comment le guérir ? Comment le cacher ? Comment le tirer de là ?


VALERIE MASUYER.