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de toutes les difficultés pendantes, avec la question d’Egypte comme point central. Le public, nous dit Sir Thomas Barclay, n’a pas connu jusqu’à ce jour le sérieux effort tenté alors par ces deux hommes d’Etat pour amener une entente entre les deux pays. Le projet élaboré ne parut, malheureusement, acceptable ni à l’un, ni à l’autre des gouvernemens. Peut-être les difficultés vinrent-elles de la question d’Egypte et de celle du Haut-Nil, l’Angleterre étant de plus en plus convaincue que l’occupation était pour elle une nécessité géographique et que rien ne devait la limiter, tandis que du côté français le sentiment contraire n’était pas moins fort. En tout cas, le résultat confirma l’ambassadeur dans l’opinion qu’avant de songer à faire aboutir un rapprochement diplomatique, il était indispensable de modifier l’atmosphère parlementaire.

En attendant, les relations franco-anglaises restaient fort peu satisfaisantes et Lord Dufferin en fit la remarque à M. Barclay, un soir de juin où l’Ambassade offrait son banquet annuel en l’honneur de l’anniversaire de la reine. « Des efforts privés, dit-il, réussiraient peut-être là où les gouvernemens semblent échouer. Votre Chambre de commerce fait une bonne besogne, dans l’esprit qui convient. Mais le sentiment anti-anglais est probablement moins fort dans le monde du commerce, dont les intérêts matériels pourraient souffrir d’une riposte anglaise. Quant aux basses classes, je doute qu’elles aient là-dessus un sentiment quelconque. C’est le monde politique, ce sont les classes et professions où il se recrute, qui attisent les rancunes et l’irritation. La Société que vous vous proposez de fonder pourrait changer cela en groupant des personnes qui appartiennent à ces classes. »

Lord Dufferin, qui voyait ici très juste, faisait allusion à la Société franco-écossaise. Ce projet de M. Barclay est caractéristique de son esprit et de sa manière. Écossais, il se proposait tout naturellement de s’appuyer d’abord sur la tradition franco-écossaise, qui est celle d’une vieille entente et d’une longue amitié. La formation d’une Société franco-écossaise, fondée sur les relations historiques de la France et de l’Ecosse, était un dessein à la fois ingénieux, raisonnable et pratique. Cette Société elle-même pouvait rattacher sa fondation à un objet précis, concret. Il y a à Paris, rue du Cardinal-Lemoine, une maison du XVIIe siècle, qui garde, au-dessus de son portail, cette