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attire une grande affluence au théâtre de Covent Garden. Il conjecture que c’est peut-être pour la décoration, fort belle, imitée des dessins du fameux Loutherbourg ; mais la décoration, si belle, ne fait que mieux ressortir le ridicule de la comédie. Fontanes a visité un cabinet d’histoire naturelle, celui de Sir Arthur Lewis : Cook y a déposé la plus grande partie des curiosités qu’il rapportait de Tahiti. « La collection de ce chevalier baronnet est superbe. Il a consacré une salle entière aux présens de Cook ; on l’appelle Sandwich room, place de Sandwick, du nom d’une des isles découvertes par ce grand navigateur. On y lit des inscriptions honorables pour lui, et on y voit son portrait. C’est jusqu’à présent le seul hommage rendu à sa mémoire par les Anglais. Ce que je vais vous dire vous paraîtra bizarre ; mais la France les a souvent avertis du mérite de leurs grands hommes… » Vers la fin de cette longue lettre, Fontanes promet à Joubert de revoir Banks ; et il ajoute : « Pour vous seul. » Enfin : « Vous aurez d’excellens détails sur Cook… » Les excellens détails sur Cook, si Joubert les a eus, ce ne fut pas, sans doute, par une lettre. Ou bien la lettre est perdue. Mais, à son retour de Londres, Fontanes put raconter à son ami ce qu’il avait appris. Joubert a noté quelques traits d’une de leurs causeries. Sur les Anglais, sur Pitt, sur les mœurs privées et politiques de l’Angleterre, Fontanes savait bien des choses. Et, dans ce résumé, je trouve le nom de Reynolds, qui dut être l’occasion de parler d’Omaÿ et de Cook. D’ailleurs, il ne me semble pas que Joubert ait tiré grand parti de ce que Fontanes lui apportait. Un petit nombre de faits seulement paraissent provenir de cette information. Ainsi Joubert signale que, dans la patrie de Cook, on a frappé des médailles en l’honneur du héros ; et il indique aussi que l’Angleterre a moins accordé que la France a la gloire de Cook.

Principalement, c’est aux relations des voyages de Cook, lues et relues sans cesse, que Joubert se confie. Il prend des notes, plus ou moins succinctement. Un petit incident le séduit par le pittoresque ou la poésie. Souvent, il s’amuse à combiner la phrase ; et il note aussi son commentaire, sa méditation, sa rêverie. Il commence une rédaction ; puis il l’abandonne : et il flâne, avec plaisir. Je voudrais donner une idée de ces brouillons, qui sont très nombreux et confus, quelques-uns datés, les autres non, et tous, dans l’inévitable fatras des paperasses,