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tiré parti de l’avantage que leur donnait la maîtrise de la mer pour menacer, au moins, l’empire allemand dans ses parties vitales, et constatons au contraire avec une grande satisfaction que, cette fois, l’afflux des renforts allemands tirés des duchés de l’Elbe et d’ailleurs n’a pu donner aux 4e et 6e armées la victoire décisive sur laquelle elles comptaient.

Le point intéressant, — toutes réserves faites sur des dessein » qu’il convient que le public ignore, — c’est que, si rien n’indique que les alliés aient l’intention d’entreprendre sur les côtes de l’Allemagne ou du Jutland, si rien n’indique même qu’ils jugent à propos d’opérer en arrière du flanc droit de la 4e armée, vers Zeebrügge, la descente que les Allemands semblent redouter et contre laquelle ils prennent visiblement des précautions, l’état-major de Berlin, se jugeant toujours vulnérable du côté de la mer, reste convaincu que sa frontière du Nord peut être l’objet d’une attaque sérieuse, qui serait dirigée en particulier contre le canal maritime, sûr abri de ses cuirassés et précieuse ligne de communications intérieure de sa flotte.

Le canal Kaiser-Wilhelm n’avait point, jusqu’ici, de défenses propres. Son débouché dans le fjord de Kiel et, par-là, dans la Baltique, est bien couvert par le fort de Holtenau et, plus au Nord, par celui de Pries. Mais ces ouvrages appartiennent expressément au camp retranché de Kiel, resté inachevé ; ils ont pour objet immédiat, ainsi que celui de Rödsdorf, de l’autre côté du fjord, de protéger les derrières des forts et des batteries de côte qui battent le goulet de Friedrichsort. Je note en passant que, ni Holtenau, ni Pries, ni Rödsdorf ne sont organisés à la moderne et ne supporteraient ni un siège régulier, ni même un bombardement : ce sont, tout au plus, de bons points d’appui pour, des lignes de fortifications passagères comme celles dont font couramment usage les armées affrontées depuis tantôt trois mois, des Vosges à la mer du Nord.

Le point central du canal maritime, Rendsburg, à l’embranchement du canal même et de l’Eyder canalisé, n’a aucune défense permanente. On n’en avait pas prévu davantage au pont de Grünthal, où passe la ligne du Schleswig occidental. Or ce pont, très grand et élevé, est établi de telle sorte que sa destruction interromprait pour longtemps le transit dans le canal maritime.

A Brunsbüttel, débouché dans l’estuaire de l’Elbe, il n’existe