est qu’elle ne savait pas ce que ferait la Bulgarie le jour où elle entrerait elle-même en action : puisqu’elle sort de la réserve, il faut croire qu’elle le sait maintenant et que des assurances mutuelles ont été échangées. De grands pas ont été faits depuis quelques jours ; des résolutions définitives ont été prises ; il est probable que le printemps prochain en verra l’exécution. Alors il y aura un changement profond sur l’échiquier où se joue le sort du monde, et l’Autriche-Hongrie regrettera peut-être de n’avoir pas su se décider à temps. Ne disait-on pas d’elle déjà autrefois qu’elle était toujours en retard d’une idée, d’une armée et d’une année ? A présent on ne compte plus par années, mais par semaines, presque par jours, et les retards les plus brefs peuvent amener les plus longues conséquences.
Et l’Italie ? Elle n’a pas encore parlé d’une manière aussi claire que la Roumanie : cependant M. Salandra a dit un jour à la tribune que la neutralité, qui avait suffi jusqu’alors, ne suffirait pas toujours. Cette neutralité a été maintenue, le gouvernement l’a observée de la manière la plus stricte, mais le sentiment public nous est de plus en plus favorable et des Italiens de marque sont déjà venus combattre dans nos rangs. La France a été touchée, émue, en apprenant que deux petits-fils de Garibaldi avaient été tués, à peine à quelques jours d’intervalle l’un de l’autre, en défendant son territoire. Que ces deux jeunes gens emportent dans la tombe notre souvenir reconnaissant ! M. le Président de la République a envoyé ses condoléances à leur père, le colonel Ricciotti Garibaldi, qui a lui-même combattu pour nous en 1870 et qui a répondu à M. Poincaré en termes dignes de Plutarque. Ce sont là des liens de plus entre deux pays qui ont si souvent mêlé leur sang. Qui pourrait dire s’ils ne le mêleront pas encore, et bientôt ? Bornons-nous à constater qu’il n’y a jamais eu de situations plus analogues que celles de la Roumanie et de l’Italie à l’égard de l’Autriche-Hongrie : il serait par conséquent naturel que leurs résolutions finales se ressemblassent aussi.
En attendant, l’Italie a donné une preuve nouvelle du remarquable esprit d’à-propos qui est le sien : ce n’est pas d’elle qu’on a jamais dit qu’elle était en retard, fût-ce d’une heure. On sait quels sont ses intérêts dans l’Adriatique : elle en a plus particulièrement concentré la représentation et la défense dans la petite ville de Vallona, en Albanie, dont l’occupation, en face d’Otrante, devait lui permettre, de barrer cette mer. Si elle ne l’a pas occupée plus tôt, c’est que l’Autriche avait des intérêts du même ordre qu’elle n’aurait sacrifiés pour rien au monde, et que l’occupation de Vallona par