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autre chose : elle expiera une seconde fois comme la première, et plus durement même, sa défection à la cause balkanique. Personne ne croira qu’elle ait agi pour des motifs financiers. Si elle avait eu seulement besoin d’argent, elle aurait pu s’en procurer à meilleur compte auprès de nous. A la suite d’une conférence qui vient d’avoir lieu à Paris entre notre ministre des Finances, M. Ribot, et les ministres des Finances de Russie et d’Angleterre, M. Bark et M. Lloyd George, un accord a été conclu en vertu duquel, « résolus à unir leurs ressources financières aussi bien que leurs ressources militaires, afin de poursuivre la guerre jusqu’à la victoire définitive, » les trois gouvernemens ont décidé de « prendre à leur charge, par portions égales, les avances faites ou à faire aux pays qui combattent actuellement avec eux ou qui seraient disposés à entrer prochainement en campagne pour la cause commune. » Avons-nous besoin de faire remarquer l’importance de cet accord et les facilités qu’il assure à ceux qui marcheront avec nous ? Il y avait là une bourse ouverte ; la Bulgarie aurait pu y puiser et elle y aurait trouvé des conditions plus généreuses que celles des banques allemandes, plus respectueuses aussi de sa dignité. Elle ne l’a pas voulu. L’esprit de vengeance lui a dicté ses résolutions. Elle n’a pas oublié la sévère mais juste leçon qu’elle a reçue en 1913. Mais la rancune est mauvaise conseillère, et on avait cru au roi Ferdinand un autre esprit politique.

Il est difficile de prévoir les conséquences immédiates qu’aura dans les Balkans l’altitude prise par la Bulgarie : nous espérons cependant que ce ne sont pas celles qu’on en attend à Berlin et à Vienne, aussi bien qu’à Sofia. On a voulu intimider la Roumanie et, par contre-coup, l’Italie. Mais, de tout temps, la diversion bulgare a été prévue comme possible, et la marche des événemens n’en a pas été troublée jusqu’ici. Un avenir prochain montrera de quel côté on s’est trompé.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

FRANCIS CHARMES.