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Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 26.djvu/578

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l’année même où celui-ci périt à Lützen, le woïvode lui avait envoyé un agent, Paul Strasbourg, mais ce ne fut qu’à partir de 1637 que les négociations avec la Suède et la France prirent assez de consistance pour aboutir en 1643 à un traité. L’activité diplomatique de Rakoczy ne se limitait pas à ces deux États. En 1637, il traitait avec un agent du landgrave de Hesse, qui, l’année précédente, avait contracté une alliance avec la France. De 1637 à 1638, un professeur distingué de l’Université de Weissenbourg, Henri Bisterfeld, porteur des instructions du prince, sous prétexte de recruter des collègues, visita les cours de l’Europe. On constate sa présence à Stockholm un peu avant le 10 octobre 1637 et à Paris en juillet 1638. Il venait proposer un traité par lequel son maître s’engageait, moyennant un subside, à faire entrer en Hongrie au mois de septembre une armée de 40 000 hommes. Il le justifiait des soupçons qu’avait fait naître son altitude passée, il affirmait sa bonne intelligence avec le Divan. Le projet obtenait l’approbation de Grotius, l’ambassadeur de Suède en France et celle de Richelieu. Celui-ci pensait que, si l’affaire se concluait, le général suédois Baner devait entrer le plus tôt possible en Silésie, se rapprocher du prince de Transylvanie. Les représentans de notre pays et des Provinces-Unies à Constantinople reçurent l’ordre de seconder la négociation. Du Bois d’Avaugour fut chargé de porter à Rakoczy la réponse aux propositions de Bisterfeld. Le 15 novembre, il était reçu en audience à Ristritz. La sollicitude du woïvode pour les intérêts de ses coreligionnaires de Hongrie mit fin à ses hésitations et à ses atermoiemens, il traita avec la France et la Suède (1643). Ses alliés lui accordaient un subside annuel de 1 200 000 écus, et s’engageaient à respecter l’indépendance et l’intégrité de la Hongrie et de la Transylvanie. Il prit les armes l’année suivante. Ses succès lui procurèrent en 1645 une paix avantageuse. Le traité de Linz remédia aux infractions de celui de Vienne, reconnut les droits constitutionnels de la Hongrie, sans excepter l’article 31 de la bulle d’or d’André II qui légitimait l’insurrection, rétablit les protestans dans leur situation légale et consacra l’autonomie des deux pays. On ne connaîtrait pas Georges Rakoczy tout entier, si on ne signalait en lui que le politique hardi et mesuré ; il faut y voir aussi, comme dans Bethlen Gabor, dont il se rapproche par bien des côtés, un protestant fervent et tolérant, un protecteur ardent de ses coreligionnaires,