jusqu’à nouvel ordre, c’est vers la Bulgarie que les partisans de l’intervention se tournent avec le plus de confiance. Qui l’aurait dit, qui l’aurait cru hier encore ? La politique bâtit sur des sables mouvans. Peut-être a-t-il suffi que la Grèce manifestât une volonté abstentionniste, pour que la Bulgarie éprouvât subitement des tendances en sens inverse. Le roi Ferdinand n’a pas de préjugés ; il se tourne et se retourne suivant l’intérêt du moment ; il ne s’est jamais piqué de fidélité et d’ailleurs on ne lui connaît aucune attache qui le gêne. Hier encore, il convoitait ardemment la Macédoine, il la revendiquait comme son bien, il était à celui qui la lui donnerait. On lui conseillait alors de se tourner du côté de la Thrace et d’Andrinople, et il en faisait fi. Les dédaignait-il vraiment ? Non certes ; mais il se croyait si assuré de les avoir quand l’Empire ottoman achèverait de mourir, qu’il ne mettait aucune hâte à les prendre et que, les considérant comme nécessairement à lui, il ne les acceptait pas à titre de compensation aux renoncemens ou même aux ajournemens qu’il pourrait consentir ailleurs. Il ne voulait que la Macédoine ! Mais l’expédition commencée aux Dardanelles a changé tout cela. Si les détroits sont forcés, et ils le seront, si Constantinople est prise, et elle le sera, l’Angleterre, la Russie, la France auront en main ce qui reste de l’Empire ottoman : qu’en feront-elles ? Que feront-elles de la Thrace ? Que feront-elles d’Andrinople ? Il est possible que le roi Ferdinand ait senti le besoin d’être là le jour où s’accompliront tant de métamorphoses. À ce moment, les absens auront tort. Mais ce raisonnement, qu’on prête au roi de Bulgarie, est-il vraiment le sien ? Demande-t-il quelque chose de précis, à la manière de l’Italie ? Pose-t-il ses conditions ? C’est ici que les renseignemens s’arrêtent et que les prévisions seraient téméraires. Il se fait sans doute depuis quelques jours un travail diplomatique d’une grande activité et intensité, mais nous n’en connaissons que peu de chose. Les journaux ne nous renseignent guère que sur les attitudes que les divers pays prennent devant le public, mais les gouvernemens restent mystérieux. Et qui pourrait le leur reprocher ? Ils ont de lourdes responsabilités et se délient des imprudences de langage. Loin qu’ils s’en délient trop, on peut craindre quelquefois qu’ils ne le fassent pas assez.
En attendant que la situation s’éclaircisse, la guerre continue dans les conditions favorables que nous avons indiquées en commençant. Favorables, disons-nous, et vraiment nous sommes de plus en plus sûrs de ne pas nous tromper en voyant le trouble de plus en plus grand et l’agitation de nos ennemis. Quand ils font à l’Italie des