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de M. Sonnino, émet l’avis que les mouvemens de l’Autriche contre la Serbie ne constituent pas l’occupation temporaire prévue par l’article 7 de l’alliance et que dès lors cet article ne saurait être invoqué. M. Sonnino proteste et fait remarquer qu’on a déjà nommé un gouverneur à Belgrade. C’étaient là les premières passes d’armes. Le 11 janvier, le baron Macchio, de retour de Vienne, cesse de combattre le principe des compensations et propose de les prendre en Albanie, mais très judicieusement M. Sonnino refuse de s’engager dans ce guêpier. Ce n’est pas là qu’il veut aller. Où donc ? M. Sonnino le dit nettement au prince de Bülow, le 14 janvier : pour la première fois, il parle de Trente et de Trieste, à quoi l’ambassadeur d’Allemagne répond que l’Autriche aimerait mieux faire la guerre que de céder Trieste, mais il croit que l’Italie pourrait obtenir le Trentin, sans rien de plus.

Si la négociation avait fait un pas, c’était un bien petit pas. M. Sonnino se plaint, il se dit découragé, il ne conteste pas la bonne volonté de l’Allemagne, mais il ne croit pas à celle de l’Autriche, il ne veut pas être berné, et cette note pessimiste s’accentue encore chez lui lorsque le baron Burian, qui a remplacé le comte Berchtold, demande des délais pour répondre et objecte, en attendant, que l’Italie aurait dû se mettre d’accord avec l’Autriche avant de s’emparer de Vallona et des îles du Dodécanèse. Cette diversion est de mauvais augure. M. Sonnino achève de perdre le peu de confiance qui lui restait. On veut évidemment traîner les choses en longueur à Vienne, mais il ne se prêtera pas à ce jeu. Il déclare, le 12 février, que l’Italie, pour sauver sa dignité, retire toute proposition de discussion et que, se retranchant derrière l’article 7, elle considérera comme directement contraire à cet article toute action militaire qu’à partir de ce jour l’Autriche ferait dans les Balkans contre la Serbie, le Monténégro ou tout autre, sans entente préalable avec Rome. Cette fois, la négociation avait fait un pas en arrière. Le baron Burian refuse d’admettre le point de vue italien, et le duc d’Avarna écrit à son gouvernement qu’il n’y a plus d’illusion à se faire sur les dispositions de l’Autriche. Puisqu’il n’y a plus rien à ménager, on ne ménage plus grand’chose et M. Sonnino, après avoir rappelé ses griefs et ses prétentions déjà connues, déclare « vouloir une compensation immédiate du fait même du commencement de l’action militaire de l’Autriche dans les Balkans, indépendamment des résultats que cette action pourrait avoir, sans exclure cependant qu’on puisse stipuler d’autres compensations sous forme conditionnelle