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dépensé beaucoup d’intelligence, était vue avec faveur par le président Roosevelt, qui y a engagé l’un de ses fils.

Les financiers des Etats-Unis contrôlent ainsi les organes de communication d’une grande partie du Brésil ; ils voudraient étendre leur commandement sur les routes internationales de l’Amérique méridionale, du Brésil vers la Bolivie, le Pérou, l’Equateur, le Paraguay, l’Uruguay, l’Argentine. Dans cette dernière République, des maisons de Chicago poursuivent l’accaparement méthodique des frigorifiques, dont la plupart, — appliquant des idées d’origine française, — étaient exploités jusqu’ici par des capitaux anglo-argentins ; ces manœuvres ont déjà déterminé, sur place, une hausse excessive des prix du bétail et une diminution correspondante du cheptel. L’objet immédiat de cette politique économique est d’anéantir des concurrences, afin de faire ensuite la loi aux consommateurs ; un objet plus lointain est l’assouplissement des marchés sud-américains aux convenances des États-Unis ; ainsi le Brésil, qui vend aux Yankees les deux tiers de son café et de son caoutchouc, n’est pas libre de leur refuser une détaxe sur leurs farines, au détriment des Républiques voisines, qui en fourniraient aussi bien ; il y eut de ce chef, en 1913, des conversations un peu vives entre Rio de Janeiro et Buenos Aires, mais le Brésil n’en a pas moins, par décret du 10 février 1914, prorogé ses faveur aux farines du Nord.

Ces poussées sur le terrain économique ne compromettent assurément pas l’autonomie de grandes nations telles que l’Argentine et le Brésil, mais créent aux Etats-Unis des intérêts tellement privilégiés et pour ainsi dire massifs, que le gouvernement de Washington, le cas échéant, aurait bien de la peine à n’accorder point à ses nationaux lésés le concours tout au moins d’une pression diplomatique ; il l’a fait voir, il y a peu d’années, par son âpreté à soutenir contre le Chili les revendications d’une firme Allsop sur des terrains à nitrates. Il agit avec moins de ménagemens encore auprès des chancelleries plus faibles ou plus voisines de l’isthme de Panama. Son action récente au Mexique en est l’illustration significative. En Equateur, où l’organisation économique est à peine ébauchée, il était question en 1911 d’un grand emprunt contracté à New York, dont les douanes eussent été probablement le gage, et aussi l’archipel des îles Galapagos ; récemment, la découverte de