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Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 27.djvu/89

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d’homme, le terrible massacre recommencera. N’est-ce pas voir l’avenir trop en noir ? Mais ce qui fait pour nous le prix exceptionnel des déclarations du grand biologiste, c’est le jugement si grave dont il accable la Kultur allemande : « Notre ancêtre des cavernes pillait et assassinait franchement et sincèrement, sans tourmenter ses victimes à l’aide de théories anthropologiques ; aujourd’hui les agresseurs, quand ils se sentent forts, écrivent des livres savans, pleins de haute philosophie, non seulement pour justifier leurs crimes et leurs iniquités, mais pour se présenter au monde comme une race supérieure à laquelle tout est permis. » Que pouvons-nous demander de mieux ? Le plus grand savant de l’Espagne actuellement vivant, un homme d’une probité scientifique indiscutée, d’une indépendance absolue, et qui plane très au-dessus des manèges de la politique ou des coteries des littérateurs, nous a livré le fond de sa pensée, et cette pensée est la condamnation la plus formelle de tout ce qui anime depuis quarante ans l’intellectualisme germanique. Un tel aveu dispense de bien d’autres et rachète beaucoup d’écarts, au demeurant assez négligeables, de langage et de jugement.

L’opinion publique des masses, en Espagne comme à peu près partout, dépend du journal à un sou que le demi-lettré absorbe quotidiennement, qu’il propage et qu’il commente dans les milieux où la lettre moulée demeure indéchiffrable. Les informations puisées à d’autres sources sont rares et en dernier ressort remontent presque toujours à ce qui, très à la hâte, a été écrit et pensé, — si ce dernier mot ne paraît pas trop ambitieux, — dans quelque bureau de rédaction ou quelque antichambre de ministère. Comment rectifier le travail d’assimilation auquel se livrent tant de gens crédules et bornés ? En ces temps de trouble, beaucoup de personnes s’improvisent directeurs de conscience, qui ne possèdent pas toutes les qualités de l’emploi ; mais, d’autre part, tout vaut mieux que l’indifférence et l’abstention. Quiconque se sent en mesure d’éclairer son prochain, d’arrêter la propagation de fausses nouvelles, de redresser des erreurs de jugement ou de conduite, doit s’y employer. Un fort bon exemple de ce dévouement à la chose publique vient d’être donné en Espagne par M. Alvaro Alcalá Galiano, dans un petit opuscule intitulé : La Vérité sur la guerre. Origine et aspects du conflit européen. Fils cadet du comte de Casa Valencia, qui fut ministre d’État et ambassadeur à Londres,. M. Alcalá