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l’ingénieux et héroïque sergent Bobillot, dont l’histoire militaire a été fort bien racontée par M. Azibert dans les Sièges célèbres. C’est un magnifique épisode. Ils ne sont pas 650, avec le commandant Dominé, et les Chinois sont 13 000. Bobillot, sous-officier du génie, devient d’office chef du génie de la place. Les Chinois font des mines. Ils ont de la poudre, Bobillot n’en a pas. « Faisons quand même des galeries, dit-il : elles serviront d’évens et diminueront les effets des explosions. » On en fait, on gagne du temps, on tient jusqu’au moment où, enfin, arrivent les troupes de secours.

Les mines servent, couramment, à détruire les mines de l’adversaire. L’un cherche l’autre sous le sol, s’arrêtant de travailler, par intervalles, pour se mettre aux écoutes, et juger à quelle distance se trouve la galerie ennemie. Ce n’est pas pour y pénétrer, mais pour la faire sauter, la détruire, en empêcher le prolongement, et surtout l’utilisation. Dès que l’un se croit à bonne portée, il établit son fourneau de mine, bourre, et fait exploser. Il faut ici bien posséder ses formules, car la charge varie selon l’effet à produire, et pour faire jouer un camouflet, elle doit être exactement calculée. Le camouflet est l’explosion souterraine qui enfonce la galerie adverse et ameublit le sol à la ronde, sans produire d’effets extérieurs : explosion fort redoutable d’ailleurs, car elle remplit la galerie de l’ennemi de gaz asphyxians.

Les mines ont été souvent employées à faire sauter des batteries. Mais c’était au temps où la portée des canons était telle qu’on pouvait en approcher de très près. Au siège de Turin, en 1706, sur 16 pièces d’une batterie, 13 furent culbutées et enterrées par l’explosion de 4 fourneaux aménagés sous elle. Cet exploit fut même renouvelé plusieurs fois.

On emploie encore les mines à détruire les forts, ou ouvrages défensifs qu’il faut évacuer et qui serviraient de point d’appui à l’ennemi. Ou bien les maisons d’une ville. Au siège de Saragosse, nous tenions une faible partie de l’enceinte. La ville avait été partagée en sortes de forteresses juxtaposées, par des barricades et autres défenses. On ne pouvait songer à les attaquer de front : on les entreprit par en dessous. On chemina de cave en cave, en faisant des explosions successives qui vinrent à bout de la résistance pourtant désespérée des Espagnols. Avec les mines on peut tout, — ou on ne peut rien : la méthode vaut