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« Ils disent :

« — Si nous troufons un Français, chez fous, nous tuerons les six enfans, puis les grands-parens, et la mère assistera à l’exécution ; puis, fusillée après… »

Une autre preuve de la véracité de ces narrations, est que nos enfans n’hésitent pas à rappeler un fait lorsqu’il est à la louange de nos ennemis :

« Lorsque les Français bombardaient, les Allemands nous disaient :

— « Tancher ! Tancher ! allez à la cave, petits enfans. »

Dans nombre de récits, exprimée en termes presque identiques, je trouve l’impression que nos adversaires ont produite dans les villages :

« Ils étaient très grands… C’étaient de véritables géans… Ils étaient vêtus d’un habit couleur de cendre, coiffés d’un casque à pointe. De longues bottes noires leur montaient jusqu’aux genoux. Le fusil à l’épaule ou en joue, ils étaient fiers d’avoir passé la frontière… »

Leur voracité stupéfie :

« Ils mangeaient comme s’ils n’avaient pas mangé depuis huit jours… Ils ont tué un porc et dévoré le lard tout cru comme des « crève-faim… » Ils se tenaient mal à table ; la bouche dans leur assiette, ils mangeaient salement leur viande avec leurs mains… »

La fillette, qui s’exprime ainsi, n’est qu’une simple paysanne d’Ile-de-France ; mais, héritière d’une race depuis longtemps affinée, éprise de délicatesse, d’élégance, on devine quelle répulsion lui ont inspirée ces mœurs grossières. On dirait qu’elle se rend compte que, bien souvent, chez les hommes, les manières dénoncent le caractère. Et voici, qu’en effet, la voix de nos petits se lève, porte témoignage de la rapacité germanique :

« Ils ont commencé par tout piller. Nous qui étions cultivateurs, nous avions de la volaille et des bestiaux. Ils nous ont tout pris : cent volailles, six bêtes à cornes. Pour se chauffer et faire leur cuisine, ils nous brûlèrent nos récoltes sans être battues ; ils démolirent les portes, les barrières, les toitures, pour eux faire leurs campemens… Ils n’ont laissé aucun fruit sur les arbres ; ils ont arraché tous les légumes dans nos jardins… »