Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 29.djvu/168

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le Nil Bleu, qu’ont décrite Hérodote, Strabon, Diodore de Sicile, Pline, et qui fut le principal centre politique, social et artistique du Soudan au temps de sa splendeur. On trouve, dans l’enceinte de la ville de Meroé ou dans ses environs, les vestiges du grand temple d’Ammon, ceux des temples d’Isis, du Soleil, du Lion, la cité royale, le palais royal, tous monumens qui datent, semble-t-il, au moins partiellement, du VIIIe ou du VIIe siècle avant Jésus-Christ, d’autres temples, une nécropole, des pyramides. On vient d’y découvrir, il y a très peu de temps, un observatoire contenant des restes d’instrumens astronomiques. On trouve également des monumens importans : temples, réservoirs, inscriptions, très avant dans l’intérieur du territoire de Meroé, à Basa, à Um Loda, Naga, Mousaouarat, etc.

Il est difficile encore d’apprécier exactement les résultats donnés par des travaux commencés à une époque si récente qu’on a publié seulement une petite partie, et non la plus importante, des découvertes qu’ils ont permis de réaliser, et cela d’autant plus que, si l’on possède déjà l’alphabet des inscriptions en langue nubienne, on n’est pas encore à même de les lire[1]. Ce qui est certain, c’est que ces contrées, actuellement incultes, pauvres et dépeuplées, étaient, à une époque très ancienne, habitées par une population nombreuse, riche, industrieuse, dont les chefs avaient des besoins raffinés- Ce que les archéologues découvrent de cette civilisation ne consiste pas seulement en temples et en nécropoles. Les Nubiens d’alors n’ont pas bâti seulement des tombeaux monumentaux, des temples grandioses ornés de statues, couverts de peintures et d’inscriptions et dignes d’être comparés aux plus beaux de la Haute-Egypte ; leur richesse et leur goût artistique se sont manifestés par d’autres vestiges relatifs à la vie sociale et qui permettent d’induire qu’ils étaient pourvus d’un bon gouvernement.

Le long des deux Nils, les villages, les bourgades et les villes formaient une chaîne ininterrompue. Les ruines de cités considérables se rencontrent dans les régions de Wady-Halfa, de Soba, de Dungeil, de Ghezireh et jusque sur les rivages de la Mer-Rouge. Leurs habitans possédaient, même aux temps les

  1. F. L. Griffith, The meroitic inscriptions of Shabul and Karanog et The meroitic inscriptions of Karanog dans Areika de R. Maciver,