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L’IDÉE DE LA MORT
ET
LE PRIX DE LA VIE

Célébrer le grand changement d’âme déterminé par la guerre dans la nation française est devenu une banalité. Mais le plus souvent les banalités sont des vérités. De fait, rien n’est plus vrai que la transformation subie. Un souffle de patriotisme farouche et d’abnégation sublime a passé dans toutes les poitrines. Des forces latentes se sont dégagées ; des sacrifices héroïques, invraisemblables, ont été consentis, et le scepticisme frivole s’est mué en un saint enthousiasme. Une universelle volonté vers le bien inspire toutes les mentalités.

Nous ne voulons nullement faire ici le bilan de cette rapide évolution. Mais il est un point de psychologie sur lequel doit être appelée l’attention des rêveurs, et peut-être même des autres. Il s’agit de la forme que revêt à l’heure présente l’idée de la mort.

La mort ! Le plus redoutable des problèmes qui aient jamais passionné les hommes, même les plus incultes, même les plus sauvages.

Aujourd’hui, à force de voir la mort de près, on a fini par reconnaître qu’elle n’est pas aussi terrible qu’on le croyait il y a peu de temps.


* * *

Aux anciens, nos maîtres en toutes choses, la mort n’inspirait que peu d’épouvante. Alors les soldats qui marchaient à la