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bourgeois, de mettre fin à la trêve nationale, de garder leur indépendance à l’égard du gouvernement et de lui faire entendre le désir de paix qui s’est emparé du peuple. « On veut bien, disait le Manifeste, nous demander nos voix pour les crédits, mais sur d’autres questions importantes, où est notre garantie qu’on nous consultera ? »

Cette démonstration pour la paix était encore appuyée par une lettre ouverte de deux cents « hommes de confiance » du parti, fonctionnaires de syndicats, rédacteurs de journaux, parmi lesquels figurent neuf députés au Reichstag et trois au Landtag de Prusse et qui ont recueilli par la suite un grand nombre de signatures. La Lettre ouverte blâme encore plus énergiquement que les « trois » la politique opportuniste inaugurée le 4 août. « L’adoption de la trêve nationale est une croix sur la tombe de la lutte des classes. » Ceux-là encourent la plus grave responsabilité qui entraînent le parti sur ce terrain glissant. Les masses écrasées attendent de leurs députés qu’ils réclament la fin d’une lutte terrible…

Au nom de la majorité, le comité directeur répondait officiellement, le 26 juin, dans le Vorwaerts au Manifeste des trois et à la Lettre ouverte. Le parti n’a aucune raison de changer l’attitude adoptée le 4 août. Il était nécessaire de se mettre au service de la patrie quand les Cosaques du Tsar traversaient la frontière, pillant et brûlant. Bien qu’opposés à toute annexion, les socialistes doivent accorder leur aide au gouvernement jusqu’à ce que la guerre ait une issue heureuse. En combattant pour l’indépendance nationale, ils préparent pour l’avenir le terrain indispensable à la lutte de classe. Les socialistes condamnent les horreurs inséparables de la guerre, mais point de façon unilatérale (absolution commode de la sauvagerie teutonne). Aujourd’hui, alors que la situation créée par la bravoure des armées allemandes lui semble favorable, le comité directeur s’adresse à la bonne volonté du pouvoir et à l’effort de pression du prolétariat pour que l’Allemagne prenne l’initiative de négociations qui mettent un terme à la guerre sanglante. — Mais l’obstacle est venu des socialistes anglais et français, alliés du Tsar, qui ont rompu tout lien avec les camarades allemands, refusé de se rendre à l’appel du bureau socialiste international transféré en Hollande, et mis à néant tout projet d’accord général et d’entente pour la paix, car la majorité en Angleterre et en