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LE SENS DE LA MORT (1)


DERNIÈRE PARTIE (2)


XXI
Une infirmière rencontrée sur l’escalier me dit qu’elle venait de croiser l’aumônier dans la cour. Je me hâtai. Il avait déjà passé la porte. Je ne l’atteignis qu’à l’angle de la rue Saint-Guillaume et de la rue de Grenelle. Le pauvre abbé eut un geste de consternation en me voyant arriver vers lui, la tête nue et

dans ma blouse d’hôpital. — « Le lieutenant est plus mal ? » interrogea-t-il, me prou- vant ainsi combien il s’intéressait à son « Centurion. » — « Non, » lui dis-je, « mais il veut vous voir. » Et j’ap- puyai sur l’insistance presque anxieuse du blessé, sans raconter, bien entendu, le fâcheux épisode qui l’avait précédée, et, je le comprenais, provoquée. — « J’y vais, » dit simplement le prêtre. Il opposait main- tenant à ma curiosité ce visage atone, que je connais si bien, celui que nous prenons, nous autres, dans les consultations. Comme je l’accompagnais, il me demanda sans préparation : — « Croyez-vous, docteur, que le lieutenant pourrait être transporté, sans danger, dans un autre hôpital ? Je veux dire à la campagne, par exemple ? » — « Mais non, monsieur l’abbé. Jamais le Professeur ne le permettrait. Et pourquoi, d’ailleurs ? » (1) Copyright by Paul Bourget, 1915. (2) Voyez la Revue du 1" et du 15 aoiit.