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d’ailleurs souvent illicites ; s’assurer quelque avantage, fut-il médiocre, mais quand même utile, telle est sa ligne de conduite, s’agit-il de questions primordiales ou d’affaires de détail.

Il y avait à Kamina un poste de télégraphie sans fil de très grande puissance. L’existence de ce poste était connue du gouvernement des deux colonies voisines, mais on ignorait encore l’endroit exact où il se trouvait. Si l’on s’en étonne, nous répondrons en rappelant ce que tous connaissent de l’avant-guerre et ce que chaque jour nous apprend encore. Ici, à tout bien considérer, les Allemands étaient chez eux et l’absence d’agent consulaire au Togo explique en partie l’ignorance d’un fait dont l’intérêt ressort aux yeux de tous. La guerre de course pratiquée au début par l’Allemagne contre les pavillons alliés eût-elle été aussi nuisible qu’elle l’a été à notre cause sans toutes ces stations de télégraphie sans fil disséminées ça et là à l’insu de tous ? Voilà pourquoi, dans la campagne du Togo, Kamina concentra le maximum de nos efforts. Voilà aussi comment, Kamina et ses défenseurs étant tombés en notre pouvoir, cela mit pratiquement fin à notre expédition et fut suivi d’une capitulation complète.

Mais, avant d’en arriver aux premiers actes d’hostilité entre les deux partis, il importe, dans un ordre d’idées générales autant qu’au point de vue du fait immédiat, de rappeler une démarche bien déconcertante de la part des Allemands. Eux qui n’ont respecté aucun traité, essayèrent d’abord d’obtenir de nous la neutralisation réciproque, en ce qui concerne le Togo spécialement, des trois terres limitrophes, anglaise, allemande et française. Le but qu’ils se proposaient était sans doute de préserver leur colonie du sort inéluctable qui lui était réservé par l’effort commun des Anglais unis aux Français. Mais surtout, sachant ou croyant inconnue l’existence du grand poste de télégraphie sans fil à Kamina, le gouverneur allemand espérait non pas sauver le Togo, mais garder un précieux moyen d’information, doublement rare, puisqu’il était à la fois ignoré de l’adversaire et doué d’un rayon d’action considérable. En conséquence, le 3 août 1914, le gouverneur de l’Afrique occidentale française recevait du gouverneur intérimaire du Togo, M. von Doering, l’offre de maintenir dans la neutralité pendant toute la durée de la guerre les colonies françaises voisines du Togo, ainsi que celui-ci. La même proposition avait été faite au gouverneur