Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 30.djvu/29

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

JEUNE FILLE. 2o jadis... Croyez-vous que la décision d’Angelise ait été prise à ce sujet et soit irrévocable ? — Madame, je ne sais rien. M. de Gimeuil, plus atteint que sa femme, me fit peine. Il était si fier de sa fille et l’aimait tant! Néanmoins, pour des raisons sans doute vaines, il n’a pas hésité à lui refuser ce qu’elle désirait jadis... Son remords me toucha et j’eus presque envie de lui dire la vérité ; de le consoler en lui révélant l’àme noble et claire d’Angelise. Mais Angelise ne veut pas qu’on la dévoile et, pour toujours voilée, de loin m’ordonne le silence; je me tais. Maman, en apprenant cette nouvelle, dit simplement : — Au couvent? Quelle drôle d’idée!.. On ne saurait avec plus de profondeur, définir une situation. Perrette a eu de la peine; Ninette et Ninon ont déclaré qu’Angelise leur avait toujours paru « un peu toquée. » Et, déjà, personne ne s’occupe plus, dans ce pauvre petit monde, d’Angelise au couvent.

« * Salvator Pourpa, subitement revenu, a fait chez nous une réapparition triomphale. Il a entrepris le portrait de Perrette, celui, double, de Ninette et de Ninon, et le mien. Nous posons le même jour, alternativement toutes quatre, et il en profite entre les séances, pour jeter hâtivement, d’après nous, sur la toile et le papier, des esquisses, des groupes, des farandoles à la Prud’hon, qui sont exquises. Ce matin, pendant que Ninette et Ninon fouillaient dans des cartons, curieuses, il me dit après le départ de Perrette : — Est-ce vrai que Styrenson soit amoureux de vous? — Je n’en sais rien. — Pourquoi ne l’épousez-vous pas ? — Ça vous regarde, cher et illustre maître? — Vous devriez vous marier ; vous êtes très gênante pour votre maman. — Moi ? — Oui. Vous. Vous devenez une femme. Et ne voyez-vous pas qu’elle, elle rajeunit de jour en jour? Elle ne ressemble presque plus au portrait que j’ai fait d’elle. Un beau portrait, heinî dans cette robe violacée; une allégorie du soir. Maintenant, si