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de Pékin ayant fait preuve de sa faiblesse militaire, on songea d’abord à partager territoire et populations. La Chine fut sauvée du démembrement dans les dernières années de l’Empire, par les rivalités et les jalousies mêmes des compétiteurs. Ceux-ci, ne pouvant s’entendre sur l’attribution des parts et voulant éviter qu’aucun d’eux n’arrachât quelque lambeau de territoire à la faiblesse du gouvernement, adoptèrent le principe du respect de l’intégrité de la Chine ; aucune Puissance n’aurait le droit de s’attribuer un morceau du sol ; le pays conserverait sa personnalité nationale. Le partage impossible se trouvait remplacé par le système des sphères d’influences. On traça sur la carte des régions idéales plus particulièrement réservées à l’activité commerciale et industrielle de chacun ; les provinces voisines du Tonkin échurent à la France, celles qui bordent le Yangtsékiang, à l’Angleterre, l’Allemagne eut le Chantong et ses entours, la Russie, les possessions extérieures du Nord, Mandchourie, Mongolie septentrionale. Mais ce système était fort imparfait. Comment empêcher Américains, Belges, Suisses, peuples industriels, et même les nationaux des autres Puissances voisines de la Chine de s’introduire dans les grandes entreprises de chemins de fer, de mines et d’y entremêler leurs capitaux, de former ainsi des groupes, dont les intérêts auraient pu être ou concordans ou adverses, sans tenir compte des combinaisons générales de la diplomatie ?

La nature même des choses poussa donc les diplomates vers une forme de groupement qui, dans leur intention, devait permettre une exploitation en commun de la richesse chinoise, sans pour cela renoncer au système des sphères d’influences.

De là naquit le fameux consortium, qui a tant fait parler de lui dans les dernières années de l’Empire et depuis.

Les grandes Puissances les mieux pourvues de capitaux, représentées par leurs diplomates et par leurs banquiers, devaient se grouper et prendre en mains la réorganisation économique, administrative, de la Chine. En fait, ce système fut adopté par l’Angleterre, la France, l’Allemagne et les États-Unis. Une série d’emprunts de plusieurs milliards de francs fut envisagée, afin de réaliser l’entreprise.

Celle-ci consistait d’abord à faciliter les affaires aux grandes fabriques d’armement des quatre Puissances. Des conseillers européens étaient déjà placés auprès du débile gouvernement