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montent du sol ; ainsi naissent des besoins d’échanges, auxquels le vieil appareil des communications ne suffit plus.

En Bulgarie, en Serbie, en Roumanie, des lois encouragent l’agriculture et s’attachent à répandre l’instruction parmi les ruraux ; ici ce sont des réductions d’impôts pour les terres défrichées, des exemptions douanières pour les machines agricoles, là des faveurs aux capitaux, même étrangers, qui créent des usines pour la transformation de produits locaux, brasseries, distilleries, sucreries. Au lendemain de ses succès contre la France, l’Allemagne commence à s’intéresser à l’Europe Orientale ; bien que Bismarck affecte de « ne pas lire le courrier de Constantinople, » des Allemands paraissent dans les Balkans, dès avant la guerre turco-russe ; ils viennent acheter ou moudre des grains en Bulgarie, disputer aux Autrichiens l’exploitation des forêts bosniaques et serbes. Par le Danube, l’Autriche pousse ses conquêtes vers la Mer-Noire et Salonique ; elle poursuit méthodiquement l’aménagement du fleuve pour la batellerie à vapeur ; elle s’attaque aux Portes de Fer, où un chenal balisé sera ouvert en 1896 ; ses financiers seront les premiers à préparer un plan de chemins de fer pour l’Empire ottoman.

En attendant, nous sommes encore à l’époque où le commerce extérieur des Balkans, quelle que soit la rapidité de sa hausse, se fait tout entier par mer ; les ports de la Mer-Noire sont les entrepôts des céréales, maïs et froment, que la Roumanie et la Bulgarie produisent désormais pour l’exportation ; ils servent de débouchés auxiliaires à la voie fluviale du Danube inférieur, jusqu’à ce que soit achevée, en 1894, la canalisation de la branche de Soulina, au centre du delta ; des vapeurs de 3 000 tonnes remonteront alors, sans rompre charge, jusqu’à Galatz et Braïla. Constantsa, port roumain, plage estivale de la haute société de Bucarest, ne deviendra que lentement une cité économique ; il n’en est pas de même de Varna, depuis le jour où le Congrès de Berlin, en émancipant la Bulgarie, en fait un port bulgare ; le gouvernement de Solia s’empresse de racheter aux Anglais le chemin de fer qui relie Varna à Routchouk, et qui est désormais, pour ainsi dire, l’embouchure bulgare du Danube. En Turquie, Constantinople et Salonique voient grandir leurs « marines, » quartiers banals, dont les hangars couverts de tuiles rouges font tache sur le