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maints spectacles curieux à l’observateur pénétrant et sagace qu’était, de nature, M. Eric V. Wood : mais il est arrivé en outre que le chef de celui-ci, M. Herrick, frappé probablement de ce sens inné d’observation qui était en lui, l’a chargé d’une série de tâches supplémentaires les mieux faites du monde pour nous valoir, aujourd’hui, de très vivantes et instructives peintures de quelques-uns des principaux événemens politiques, sociaux, ou même militaires, des derniers mois de l’année 1914. Du 11 au 14 septembre, notamment, notre jeune diplomate improvisé a été envoyé, en compagnie de deux officiers de l’armée de son pays, pour étudier d’aussi près que possible les diverses péripéties de la tragique et glorieuse bataille engagée par nos troupes sur les bords de la Marne, — M. Herrick ayant estimé qu’une relation détaillée de cette bataille aurait chance de fournir ses compatriotes, militaires et civils, de plus d’une leçon infiniment précieuse. Un peu plus tard, durant tout le cours du mois d’octobre, différentes autres missions non moins délicates qu’a eu à remplir M. Wood, — et au premier rang desquelles figurait le soin de relier directement avec nos « fronts » anglais et français du Nord l’Ambulance Américaine magnifiquement installée dans les locaux d’un lycée de Neuilly, — lui ont permis d’observer de la même façon les débuts meurtriers de l’immense lutte, encore inachevée, que les historiens à venir continueront sans doute d’appeler la « bataille de l’Aisne. » Et puis, vers la fin de novembre, lorsque le sort des sujets allemands et autrichiens de chez nous s’est trouvé décidément réglé pour toute la durée de la guerre, c’est à M. Wood que M. Herrick a demandé d’aller transmettre à ses collègues de Berlin et de Vienne de lourds ballots de documens diplomatiques, — dont la livraison lui a été, d’ailleurs, mille fois plus facile que celle d’un tout petit paquet de lettres « confidentielles » qu’il a dû pareillement, vers le 15 décembre, porter de l’ambassade américaine de Berlin à celle de Londres. Tout cela raconté maintenant dans un pittoresque volume que viennent de publier simultanément des éditeurs de New-York et de Londres, avec une vingtaine de photographies « inédites » d’une remarquable portée historique, la plupart exécutées par l’auteur lui-même au cours de ses « missions ; » et tout cela raconté, surtout, d’un style si vif et précis et limpide que, malgré l’effort trop visible du jeune « attaché » américain à contenir, — diplomatiquement, — l’expression de ses propres sympathies personnelles à l’endroit des Alliés, il n’y a peut-être pas d’autre livre étranger qui, depuis tantôt dix-huit mois, m’ait tout ensemble renseigné et diverti plus que celui-là.