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un les argument allemands et les ont réfutés avec une grande force. « Mais l’Allemand, qui ne reconnaît qu’à lui-même le droit de commander, voudrait se réserver celui de parler tout seul. » Aussi l’indignation a-t-elle été véhémente et violente de l’autre côté du Rhin, et des torrens d’encre ont été répandus, pendant que des torrens de sang coulaient ailleurs. Pour donner une idée de ce déchaînement, il suffit de lire les télégrammes échangés entre les cardinaux-archevêques de Cologne et de Munich d’une part et l’empereur Guillaume de l’autre. Les deux cardinaux, après avoir dénoncé le livre comme calomnieux, annonçaient qu’ils ne manqueraient pas de « déposer une plainte devant le chef suprême de l’Église. » Mais ils commençaient par en déposer une devant l’Empereur comme de juste. Nous n’avons pas appris que le « chef suprême de l’Église » ait donné la moindre suite à leur dénonciation, et Mgr Baudrillart, a l’audace de récidiver, ce dont il faut le féliciter. Chacune des allégations germaniques a été prise à partie par Mgr Chapon, évêque de Nice, M. Lanzac de Lahorie, M. Denys Cochin, le R. P. Janvier, Mgr Batiffol, M. le baron d’Anthouard, ministre plénipotentiaire, M. Edmond Bloud, M. François Veuillot, qui se sont partage le travail et l’ont exécuté avec une extrême modération dans les termes, mais beaucoup de science et de vigueur dans le fond.

Ce livre ne peut pas s’analyser, il faut le lire. Nous dirions que c’est une œuvre française, si ce n’était pas encore davantage une œuvre humaine, La préoccupation religieuse y domine, comme il convenait, étant donné le but que ses auteurs poursuivent; mais il résulte de leurs consciencieuses études que l’intérêt de la religion s’allie admirablement avec celui de la civilisation et du droit contre le déchaînement de la force et de la barbarie, qui ne se recommande d’elle que pour en fusiller les prêtres, en bombarder les temples, en violer et en déshonorer l’esprit.


Francis Charmes.


Le Directeur-Gérant,
Francis Charmes