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pour vaincre l’ennemi. Il y a là un cas si singulier de contagion « à distance » du venin allemand que je doute qu’on lui trouve autre part rien d’équivalent. Sous l’effet d’un rayonnement mystérieux, une foule innombrable d’honnêtes burghers changés en autant de « Boches » éhontés et perfides, pour qui les contrats qu’ils ont signés ne sont plus que des « chiffons de papier, » et qui jugent tout naturel, par exemple, de revêtir l’uniforme de l’armée ennemie ou bien encore de tirer sur elle après avoir feint de vouloir se soumettre.

Feuilletons au hasard le livre anglais de M. Sampson ! « En arrivant à Treurfontein, le 29 octobre, le colonel Alberts apprit que plusieurs détachemens de rebelles se cachaient dans le voisinage. Le commandant De Villiers fut envoyé, avec une forte patrouille, pour reconnaître ce qui en était : mais il tomba dans un piège et, avant même de savoir ce qui lui arrivait, se trouva prisonnier avec tous ses hommes. Ce fut ce jour-là que, pour la première fois, les rebelles s’avisèrent d’employer le stratagème du drapeau blanc. Un groupe nombreux de rebelles se montrèrent à De Villiers avec des mouchoirs blancs attachés à leurs fusils ; et lorsque le commandant et ses hommes s’approchèrent d’eux, comptant les voir se rendre, les rebelles les attaquèrent, et n’en laissèrent pas échapper un seul… Quelques jours plus tard, la même aventure arriva au colonel Royston. Ses observateurs lui ayant rapporté qu’une troupe nombreuse approchait avec un drapeau blanc et des brassards blancs comme ceux des soldats de l’Union, le colonel prit ces approchans pour un régiment de l’Union qu’il attendait : si bien qu’il ordonna de les laisser venir. Mais voilà que, parvenus aux avant-postes, les prétendus soldats de l’Union descendirent soudain de cheval et se mirent à lancer volée sur volée contre la cavalerie légère du colonel Royston ! Quatre hommes de celle-ci furent tués et plusieurs autres blessés. Après quoi le gros des rebelles essaya de prendre par surprise le camp ennemi : mais ils furent repoussés, et s’enfuirent avec des pertes infiniment supérieures à celles qu’avait causées aux loyalistes leur ruse du drapeau blanc. »

Ne croirait-on pas lire tels récits de notre « front » de l’Artois ou des Vosges, durant ces premières semaines de la guerre où nos officiers et leurs « poilus, » — tout de même qu’au Transvaal les officiers et soldats de l’Union, — ignoraient encore les nouveaux procédés stratégiques de leur adversaire ? Et ne nous semble-t-il pas également avoir rencontré naguère, dans nos journaux, d’autres traits