Le spiritualisme vient de perdre deux de ses plus fervens adeptes. L’un était un philosophe, de professeur devenu sénateur, bientôt délaissé par le flot politique, et qui, dans sa retraite, visité par la grâce, s’était consacré au culte de Jeanne d’Arc. J’ai connu Joseph Fabre dans des temps très anciens : il corrigeait les copies au Concours général. Il m’avait su gré d’avoir affirmé en latin que toutes nos fautes proviennent uniquement d’un manque d’instruction, qu’on n’a jamais vu et qu’on ne verra jamais les passions détourner de la bonne voie un homme tant soit peu éclairé. Ce sont choses auxquelles il est bon de croire à quinze ans ; Joseph Fabre en fut convaincu toute sa vie. C’était un doux illuminé. Il avait puisé ses idées dans l’enseignement de Jules Simon. À cette époque, on estimait que le gouvernement de la République appartenait de droit aux philosophes : Joseph Fabre fut un républicain des temps héroïques. Ame naturellement pieuse, il était libre penseur avec intransigeance. On contait que fils excellent, vivant avec une vieille mère, il ne manquait jamais un dimanche de la conduire à la messe et de l’y aller rechercher ; mais il ne franchissait pas le seuil de l’église. D’une absolue sincérité, honnête et probe jusqu’à l’ascétisme, il personnifiait le type de ces universitaires candides, que Paul Bourget dépeint dans ses romans sociaux. Comment vint-il à Jeanne d’Arc ? Il avait vu la guerre de 1870 ; il gravitait dans l’orbite de Gambetta, qui l’avait en haute estime ; il était, avec la même ardeur, humanitaire et patriote. Pour suffire aux besoins de la prédication à laquelle il se dévoua désormais tout entier, il se fit historien,
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CHARLES DE POMAIROLS