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par M. Rezanof. Dans ce cas, de même que dans maints autres où, pareillement, nous nous étions trouvés pour la première fois en présence d’une catégorie nouvelle d’« atrocités » allemandes, nous n’avions pu nous empêcher de nous demander si les narrateurs n’avaient pas, tout au moins, sensiblement exagéré les proportions véritables d’actes de lâche traîtrise ou de cruauté qui nous apparaissaient à peine croyables. Nous avions bien, pour nous garantir la réalité de ces actes monstrueux, la concordance absolue des différens récits qui nous les révélaient et leur parfaite précision documentaire, sans compter l’important supplément de crédit que leur donnait le contrôle d’une commission d’enquête organisée par les soins du gouvernement russe : mais, avec cela, je crains fort que plus d’un de mes lecteurs ait persisté à soupçonner vaguement la « fantaisie slave » d’avoir quelque peu « chargé » le tableau de cette extravagante ruée subite, unanime, de l’Allemagne contre des milliers de vieillards, de femmes, et d’enfans sans défense.

En fait, cependant, le tableau ne nous montrait rien que de très authentique ; et non seulement j’ai eu l’occasion, pour ma part, de lire depuis lors un bon nombre d’autres témoignages qui confirmaient de tous points les récits publiés par M. Rezanof, — sauf même à y ajouter souvent un surcroit d’horreur : mais voici qu’une dernière confirmation nous arrive qui suffirait, à elle seule, pour nous enlever jusqu’au moindre doute, nous étant expressément apportée par un groupe nombreux de témoins allemands ! Nous en devons la connaissance à un savant et ingénieux professeur anglais, M. Thomas Smith, qui déjà précédemment nous avait offert une description très fidèle des méthodes pédagogiques d’outre-Rhin, — après les avoir observées de tout près pendant de longues années de séjour à l’Université d’Erlangen[1], — et qui vient maintenant de nous rendre un service peut-être plus précieux encore en extrayant à notre intention, d’une quantité innombrable de journaux et d’autres écrits allemands de toutes les nuances, les expressions les plus caractéristiques de ce qu’ont été là-bas tour à tour, depuis le début de la guerre, les principaux courans de l’opinion nationale. Cela étant, son livre ne pouvait manquer de consacrer un chapitre spécial à la mémorable « campagne » entreprise naguère par le peuple allemand contre les « espions » russes ; et voici, par exemple, quelques-uns des documens « de tout repos » que nous y découvrons :

  1. Voyez la Revue du 15 octobre 1915.