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Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 31.djvu/959

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ministère n’était pas venu dire que, tout en maintenant au point de vue constitutionnel son droit de clore la session, il jurait de n’en pas faire usage, il aurait épargné à une assemblée faillible de dangereuses tentations. Pareillement, quand des commissaires aux armées, séduits inconsciemment par le panache et la ceinture des ancêtres, ont émis la prétention de transporter jusqu’au grand quartier général le contrôle parlementaire, si le gouvernement avait tout net refusé de s’y prêter, il aurait, au premier souffle, brisé un flot qui peut se gonfler en tempête. Il ne l’a pas fait ; et ce jour-là, il n’y a pas eu assez de gouvernement. D’une manière générale, il n’y a trop de parlement que lorsqu’il n’y a pas assez de gouvernement : d’une manière générale, il en est des Chambres et des Commissions dans les Chambres, comme il en est des ligues dans la nation. Chaque fois qu’il se forme une ligue, il est probable qu’une fonction nécessaire n’est pas remplie. Si le gouvernement tient sa place, il n’y a pas de place, pour un Comité de salut public. Mais Bismarck a dit : « La vie de l’Etat ne peut pas être interrompue ; » et Canovas : « Les nations ne veulent pas mourir. » C’est une loi de l’histoire, et c’est aussi une révolte, une revanche de la vie, que le pouvoir ne reste jamais à terre. Quand il tombe, quelqu’un le ramasse. Il passe alors des mains de ceux qui l’abandonnent aux mains de ceux qui s’en emparent.

Le pire des gouvernemens serait l’absence de gouvernement ; et le plus mauvais cesse déjà d’être aussi mauvais, par cela seul qu’il existe, pourvu que manifestement il existe, c’est-à-dire qu’il gouverne, qu’il conçoive et qu’il exécute, qu’il ordonne et qu’il coordonne ; car, de même que le mouvement ne se prouve bien qu’en marchant, ainsi le gouvernement ne se prouve qu’en gouvernant. Il faut donc, dans les temps de crise, non pas élargir, mais resserrer le gouvernement et se serrer autour de lui. C’est l’enseignement de l’expérience. Le sage qui a donné ce conseil à ses contemporains est le même qui, en des lignes immortelles, a exhorté le Prince à délivrer son pays des Barbares : « Je ne puis dire avec quel amour il serait reçu dans toutes ces provinces qui ont souffert de l’invasion étrangère ; avec quelle soif de vengeance ; avec quelle foi obstinée, avec quelle piété, avec quelles larmes. Quelles portes lui seraient fermées ? quels peuples lui refuseraient l’obéissance ? quelle envie lui créerait une opposition ? quel « patriote » lui refuserait le respect ? »


Bien que la question des rapports du gouvernement et du parlement ait, à l’intérieur, une importance vitale, nous nous excuserions