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africaines de l’un et l’autre contractant. L’Angleterre s’assurait ainsi tous les avantages que nous donnait la possession de l’Algérie, limitrophe du Maroc.

Or, l’Allemagne nous imposa une obligation qui ne pouvait que retarder la création du réseau ferré si utile à ses propres nationaux.

Nous nous engageâmes vis-à-vis d’elle, qui ne devait y trouver aucun avantage, à n’accorder la concession d’aucune ligne marocaine avant celle de la voie ferrée internationale devant réunir Fez à Tanger.

Ce chemin de fer effectuerait un parcours de près de 200 kilomètres chez nous, puis de 100 kilomètres en protectorat espagnol. Il traverserait également 15 kilomètres du territoire internationalisé de Tanger. Cette ville n’était pas encore pourvue de son statut politique dont la rédaction s’annonçait comme devant être excessivement longue et difficile. Les négociations nécessaires entre nous, l’Espagne et les diverses Puissances intéressées à la question de Tanger devaient donc immanquablement exiger de nombreuses années. La concession du premier chemin de fer marocain était par conséquent et sciemment rejetée, du fait des exigences allemandes, à une date indéterminée.

Du même coup, notre protectorat tout entier se trouvait dans l’impossibilité de construire le réseau ferré dont il avait tant besoin pour hâter sa pacification d’abord, mais aussi pour rendre possible son essor économique.

La volonté allemande de combattre, ou du moins de retarder notre œuvre marocaine, était donc évidente dès le premier jour. Elle paraît du moins telle à la lueur des événemens actuels. Bien des faits postérieurs la démontrèrent encore. Nous avions, par exemple, tourné l’interdiction de commencer un réseau ferré en construisant des Decauville, uniquement destinés aux besoins de nos troupes.

L’Allemagne protesta d’abord, puis, n’ayant pu faire prévaloir son opinion, elle tint la main à ce que la destination ou l’organisation de ces Decauville ne fût pas transformée peu à peu.

Les calculs allemands semblèrent se réaliser dans les premiers temps. Nous avions, au début de l’expédition, envoyé 7 000 hommes à Casablanca. Ce chiffre doubla dès l’année 1909, puis il diminua et nos troupes ne comptèrent plus que 6 000 hommes. Mais la marche sur Fez nous contraignit à faire