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des mines aux nouveaux submersibles et leur en donner le plus possible ; et, bien que la mine libre fût moins encombrante, moins lourde que la mine fixe, puisqu’elle n’a ni crapaud de mouillage, ni câble de retenue, c’était pourtant une notable augmentation d’espace et de poids disponibles que le marin allemand demandait au constructeur.

Je ne dis rien de la vitesse : on veut toujours, toujours aller plus vite, et il est bien rare que, dans la succession des types, la courbe d’accroissement de cette précieuse, mais coûteuse faculté présente des points de régression. Ne fallait-il pas, du reste, être assuré de ne point laisser échapper un paquebot rapide, et déjà, le 5 mai 1915, le capitaine Max Müller, directeur à New-York du Norddeutscher Lloyd, ne disait-il pas à un rédacteur du New-York Herald : « Nous aurons sûrement la Lusitania. Elle n’est pas aussi rapide que certains de nos sous-marins ; » ce qui était faux, d’ailleurs, mais ne le serait peut-être pas aujourd’hui [1] ?

Ainsi se trouvait-on logiquement amené, en dépit des inconvéniens que présentent pour les opérations côtières des submersibles qui ne peuvent plonger que par des fonds de 25 à 30 mètres [2], à adopter la seconde des deux solutions qui sollicitaient l’attention des autorités dirigeantes de la marine impériale, celle de la création du sous-marin géant, du sous-marin dreadnought, s’il est permis d’accoupler de la sorte les désignations usuelles des deux irréconciliables adversaires.

Mais quand nous disons « sous-marin géant, » que faut-il au juste entendre par là ; et enfin, s’il y a sous-marin géant, en effet, à combien d’exemplaires ce type a-t-il pu être reproduit ?

La réponse, une réponse précise du moins, n’est point aisée à ces deux questions. L’imagination s’est déjà donné libre carrière au sujet de la taille des nouveaux submersibles allemands, au sujet de leur déplacement total et de leur armement offensif et défensif. Des marins danois affirmaient, il y a deux ou trois mois, avoir vu un sous-marin dont la longueur atteignait au moins cent mètres et qui devait déplacer plusieurs

  1. Rappelons-nous que la Lusitania a été torpillée alors qu’elle ne filait que 17 nœuds. Je cite le propos significatif du capitaine Max Müller, d’après le livre si intéressant de M. Olivier Guihéneuc : Dreadnoughts ou submersibles, qui a paru, au commencement de cette année-ci, chez Perrin et Cie.
  2. Voyez à ce sujet, mon étude sur la Variété des types de sous-marins dans la Revue des Deux Mondes du 15 novembre 1915.