ordre, et il lui était impossible de répondre de tous les côtés. On tirait sur elle de partout. C’était une canonnade ininterrompue. Quel bruit ! Notre Suffren à nous était secoué par toutes les trépidations extérieures : c’était un ébranlement général.
Aussi le Suffren, voyant le danger que courait la Vengeance, est venu tout aussitôt se mettre sur bâbord pour avoir la batterie d’Hellès dans son champ de tir. À notre tour de commencer le feu sur elle. Notre réglage n’a pas été long, et, pour précis, il le fut… Puis, sans perdre de temps, nous avons envoyé trois magnifiques salves qui l’ont fait rester tranquille… Les Anglais dirent que nous l’avions silenced.
Ils étaient émerveillés de la promptitude avec laquelle nous étions entrés en action. Ils ne se lassaient pas de nous le diren et depuis, dans la flotte anglaise, on a surnommé le Suffren le fire-eater.
Ah ! oui, qu’il en connaissait des histoires, notre col bleu ! Il fallait voir comme il se redressait, lorsqu’il disait :
— Ainsi, il nous aurait fallu assister à cette fameuse journée du 25 février, lorsque nous avons dû appareiller pour une action définitive contre les forts de l’Entrée. Malheureusement, nous avions dû interrompre pendant six jours, à cause du mauvais temps, notre tir… Enfin !
L’escadre alliée était ainsi composée. Nous autres avec le Charlemagne, la section anglaise avait H.-M.-S. Vengeance et le Cornwallis.
On était parti de Ténédos le cœur léger ; enfin, on allait se battre ! Eh bien, cela a commencé à 10 h. 45, le tir. Les bâtimens anglais s’élançaient les premiers. Nous autres, on attendait… C’était joliment beau de voir ces bateaux courir… Le bruit des bordées faisait un rude tapage ; on ne s’entendait plus, et nous autres, qui étions en réserve au large du cap Téké, nous assistions sur le spardeck et sur les boulevards à ce duel à mort. On n’avait qu’une idée, c’était de prendre la suite. On bondissait d’impatience. Surtout quand on a vu le grand combat qui s’engageait entre le dreadnought Queen Elizabeth et le fort d’Hellès… À terre, les obus de 38 centimètres soulèvent d’immenses colonnes de poussière avec de la fumée, — tout disparait… Mais, toutes les deux minutes pourtant, deux