La réponse allemande à la note du Président Wilson (20 avril) étant
du 4 mai, et la réplique américaine du 8, nous n’avons pu, au jour où
nous écrivions notre dernière chronique, en avoir et en donner qu’une
impression hâtive. Il vaut la peine d’y revenir, ou plutôt, si l’on en
a assez dit sur le texte des documens eux-mêmes, de voir quelles
réactions ils ont provoquées sur ce qu’il faut bien appeler l’âme allemande. Encore n’avons-nous d’autre moyen de les connaître que de
lire les journaux, et l’on sait que la presse allemande est de toutes la
plus disciplinée, la plus « inspirée, » la plus « orchestrée, » — c’est
décidément le mot, — partant la moins sincère, en tout cas la moins
spontanée. Même en temps de paix, la situation de « rédacteur »
n’offre là-bas guère d’indépendance vis-à-vis des pouvoirs de tout
ordre et de tout degré ; à plus forte raison, en temps de guerre. Il y
est aussi difficile, plus difficile peut-être de se défendre des invitations
que des interdictions ; les gazettes les plus hardies ne parlent qu’après
que les autorités ont pensé, et naturellement d’après ce qu’elles
ont pensé. L’opinion publique est donc toujours, par reflet, — sauf
deux ou trois exceptions sans crédit à cause de cette indépendance
même qui passe pour de l’originalité, ou pis que cela, — l’opinion du
gouvernement. Et donc, pour ce que nous y cherchons, le vrai dessein du gouvernement impérial, découvrant l’état au vrai de l’Allemagne au vingt-deuxième mois de la crise, ces témoignages indirects, émis sous le masque, soufflés en d’autres bouches, n’en auront que plus de valeur.
Ce n’est que le mercredi 10 mai, après midi, que la deuxième note de M. Woodrow Wilson, — la deuxième de cette dernière série, celle qui, en une quarantaine de lignes, se borne à prendre acte et à réserver la suite, — a été remise officiellement à M. de Jagow, secrétaire d’État aux Affaires étrangères, par M. Gérard, ambassadeur