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ANGELLIER
POÈTE DE LA GUERRE

Les vers n’ont pas manqué aux deux années déjà écoulées de cette guerre, non plus qu’à nos poètes le talent ou la ferveur. Il en est sorti du fond des tranchées comme des chambres abritées de l’arrière, vers d’artistes et vers de soldats, ciselés ou improvisés, poèmes de réflexion ou poèmes anecdotiques, les uns signés de noms fameux, les autres d’inconnus. Longue serait déjà la liste de ces effusions guerrières qui ont paru dans nos journaux, dans nos revues, voire en volumes indépendans. Il a été possible de les recueillir, de les trier, d’en publier des pages choisies. Et cependant, on a pu entendre exprimer la surprise et le regret qu’une guerre aussi formidable et nouvelle que celle-ci n’ait pas encore produit en France une poésie à sa taille, qui fût sa voix distincte et rendit son accent. Il semble que nos ennemis comme nos alliés aient mieux trouvé le cri lyrique de ralliement, celui qui est fait des passions de millions d’hommes. La colère démente des Allemands contre la Grande-Bretagne a su s’exhaler en un hymne de rage, qui siffle dans l’air et éclate avec la violence de leurs plus monstrueux obus :


Nous ferons la paix, peut-être, un jour ; — mais toi, nous te haïrons d’une longue haine ; — nous ne cesserons pas dans notre haine : — haine sur mer et haine sur terre, — haine du cerveau et haine de la main ; — haine des marteaux, haine des couronnes, — haine qui serre la gorge de