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lui-même à la confection des explosifs. Or, ces produits, que nos compatriotes des Landes n’avaient pas le droit de vendre au dehors, les fournisseurs anglais purent en expédier, aux États-Unis notamment, des quantités considérables ; la prohibition de sortie n’ayant été édictée chez eux que longtemps après.

Ces différences de législation, supprimées peu à peu à mesure qu’on les signalait, vont disparaître à la suite de la Conférence, en même temps que s’atténuera la diversité de traitemens des maisons de commerce ennemies dans les États alliés : trois d’entre eux jusqu’ici n’avaient pas mis sous séquestre les établissemens qui se trouvent sur leur territoire, tandis qu’en Angleterre et en Russie la vente et la liquidation de tous ceux dont le maintien ne paraissait pas nécessaire, ont été ordonnées et exécutées : sans aucune spoliation d’ailleurs ; après les hostilités, le montant des fonds réalisés sera remis aux propriétaires.

L’Angleterre a étendu cette disposition à ses colonies ; les maisons allemandes ont été liquidées et fermées en Égypte comme en Chine, à Hong-Kong. Dans cette dernière localité, 75 pour 100 d’entre elles avaient déjà cessé d’exister en janvier dernier ; opération conduite par le gouvernement britannique au mieux des intérêts dont on voulait l’expulsion, non la ruine. Des Anglais, des Américains et des Chinois ont aussitôt remplacé les absens, substituant les produits des États-Unis à ceux de l’Allemagne. La Russie, en vertu d’une loi de février 1915, procède à la vente non seulement des biens mobiliers, mais aussi des terres possédées par les Allemands, environ 3 millions d’hectares, la plupart situées en Tauride, Kersow, Tiflis et Volhynie.

Les inspecteurs chargés de liquider les maisons germaniques ne se laisseront pas duper par les enseignes : lors des émeutes de mai 1913, où le peuple en colère voulait anéantir les boutiques allemandes, il y avait à Moscou trois magasins d’automobiles richement installés, deux français et un allemand, — le Mercedes. — La foule saccagea les deux marques françaises ; lorsqu’elle approcha de la firme Mercedes, un homme grimpa sur un réverbère et cria : « Messieurs, nous serions fous de faire du tort à la maison Mercedes, évidemment espagnole ; l’Espagne n’est pas en guerre et, si elle combattait, ce serait à nos côtés. » Sur quoi la multitude passa en criant :