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dans un abri de vingt hommes, a exposé la consigne reçue par lui : « Dès que l’attaque d’infanterie ennemie se déclenchera, mettre le feu aux mines toutes prêtes, puis remonter au jour, installer les mitrailleuses et résister à outrance. »

Pour parer aux effets d’écrasement formidables des gros projectiles explosifs, les Allemands, infatigables remueurs de terre et travailleurs acharnés, avaient construit dans toute la région des abris d’une extraordinaire solidité. Un nouveau type en avait été établi par le commandement ; du modèle dit Zwei gruppen, aménagé pour deux groupes de neuf hommes chacun, avec murs et plafond renforcés, on accédait au fond par seize marches de vingt-quatre centimètres ou par des échelles : cette chambre souterraine servait d’abri à la mitrailleuse et à son équipe. Pour remonter la machine à l’air libre, le plus souvent au moyen d’un système de cordes et de poulies, il ne faut pas plus de quelques secondes à des mitrailleurs exercés.

On a vu même de ceux-ci, aussitôt l’explosion d’une mine, installer leur engin sur les bords de l’entonnoir ; et d’autres, quand une première vague d’attaque a passé sur leur tête, cribler de leur feu ressuscité les. derrières des lignes assaillantes. De tels effets de surprise se sont produits au détriment des fantassins anglais, aux abords des villages de Thiepval et de Serre, démontrant à nos braves alliés la nécessité du fameux « nettoyage de tranchées, » opération spéciale avec laquelle, en raison de leur traditionnel amour du fair play, ils ne s’étaient pas encore familiarisés.

Mais à mesure qu’il s’enfonçait plus profondément dans le sol, l’ennemi, pour remonter rapidement ses engins au jour, était amené à perfectionner les systèmes élévatoires. C’est ainsi que dans le château de Thiepval, considéré par ses défenseurs comme un réduit imprenable et qui n’en fut pas moins emporté d’assaut le 15 septembre par nos alliés britanniques, ceux-ci découvrirent avec étonnement une extraordinaire installation comprenant cinq ascenseurs, capables de faire surgir ou disparaître instantanément hommes et matériel. Cette machinerie explique comment les premières attaques furent longtemps tenues en échec, malgré des préparations d’artillerie formidables. A maintes reprises, les assaillans avaient essuyé les feux meurtriers de mitrailleuses allemandes apparaissant et s’éclipsant « à l’instar de Punch, au théâtre d’enfans, »