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question ? Nous l’ignorons, mais ce qui n’est pas contestable, c’est qu’ayant vu le but, ils se sont accordés pour l’atteindre. La princesse Clémentine, par sa naissance, son caractère, la dignité de sa vie au rang relativement secondaire où l’avait placée son mariage, jouissait dans les cours européennes d’une considération respectueuse et d’une influence exceptionnelle qu’elle s’était acquises en ne laissant jamais oublier qu’elle était Française et fille de roi. Il est difficile de préciser les conditions en lesquelles cette influence s’est exercée dès ce moment au profit de son fils. Mais on peut affirmer, sans craindre de se tromper, qu’elle fut le principal ouvrier de la candidature du prince Ferdinand.

Bien que le Cabinet de Vienne se soit toujours défendu d’avoir suggéré aux députés bulgares l’idée de cette candidature ou de l’avoir appuyée auprès d’eux, ses affirmations à cet égard ne peuvent être acceptées comme l’expression de la vérité, alors que l’on entend le comte Kalnocky, dès que Ferdinand de Saxe-Cobourg Gotha eut été désigné comme prétendant à la couronne bulgare, se prononcer spontanément en sa faveur.

— Il n’a pas été notre candidat, déclarait-il à un ambassadeur, nous ne l’avons pas encouragé à briguer la couronne qui lui était offerte et qu’il a cru devoir accepter ; mais si son élection est régulière et comme sa personne ne soulève aucune objection, nous ne pouvons refuser notre adhésion.

Telle n’était pas l’opinion de la Russie. Son ambassadeur en France, le baron de Mohrenheim, alors en congé à Saint-Pétersbourg, télégraphiait à son chargé d’affaires à Paris que, le cas du prince de Cobourg étant illégal, le gouvernement russe ne pouvait y voir qu’une raison de plus pour ne modifier en rien son attitude. Il avait demandé à Constantinople quelle démarche comptait faire la Porte en présence de cette nouvelle infraction au traité de Berlin. Il attendait cette réponse. Mais quelle qu’elle fût, elle ne changerait pas sa détermination.

Le langage du comte de Berchen, sous-secrétaire d’Etat à la Wilhelmstrasse, n’était pas moins significatif :

— Cette candidature est contraire à l’article 3 du Congrès de Berlin ; on peut la considérer comme mort-née.

Herbert de Bismarck renchérissait sur cette condamnation :

— La candidature Cobourg n’est prise au sérieux nulle part, et même, à Vienne, on la tient pour compromettante. Les