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intervenir dans ces mêmes préliminaires ? On n’apprend rien à personne en faisant observer que ce sujet difficile est d’ores et déjà débattu devant l’opinion chez les Puissances alliées.

En 1814, les Puissances coalisées gardèrent, jusqu’à la dernière minute, l’avantage de pouvoir jouer les deux cartes, soit de traiter avec Napoléon, soit de traiter avec le gouvernement qui lui succéderait. En 1871, Bismarck joua la même partie en se prêtant sous-main aux pourparlers plus ou moins officieux engagés par les représentans plus ou moins autorisés de Napoléon III, tandis qu’il négociait ouvertement avec le gouvernement de la Défense nationale. Le point de vue uniquement pratique qui le guidait était celui-ci : ne conclure qu’avec un gouvernement assez fort, assez autorisé et assez loyal pour assurer au vainqueur une entière et honnête exécution des clauses du traité.

Les Puissances se trouveront peut-être, en Allemagne, en présence de circonstances qui leur laisseront le loisir de ne se lier que selon leurs convenances et leurs intérêts.

Peut-être prendront-elles, les unes à l’égard des autres, même avant la fin de la guerre, des engagemens, comme il semble bien que les Puissances alliées, en 1814, en avaient pris entre elles à l’égard de Napoléon. Ce sont de ces difficultés que la victoire tranche de son glaive.

Le 14 février 1814, au lendemain de Champaubert, alors que Napoléon était « ivre de joie » et se croyait, de nouveau, maître des affaires, Caulaincourt écrivait à Maret : « Toute l’Europe est contre nous. Il ne faut pas se faire illusion : on ne veut pas négocier avec nous. On veut nous dicter des conditions et nous ôter des moyens de nous plaindre… » Et Maret répondait à Caulaincourt : « Si le sort est contraire à l’Empereur, tout est inutile !… »

Ce sont les professeurs, les diplomates et les généraux allemands qui ont écrit cette page d’histoire !


IV. — DU « STATU QUO ANTE »

Abandonnons, maintenant, le point de vue spécialement allemand et retournons-nous vers l’Europe.

Nous avons dit que la négociation de la future paix aurait à préparer non seulement un châtiment, mais une réparation et une garantie.