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un immense incendie qui rougit le ciel, tandis que des détonations violentes se font entendre, les dépôts de pétrole et de benzine de l’armée sont anéantis.

Le gouvernement, qui était attendu le 29, n’arriva que tard dans la soirée ; les ministres alliés durent attendre au lendemain matin pour s’entretenir avec M. Pachitch ; ils apprirent de lui qu’on ne pouvait s’attarder davantage à Kraliévo ; le Gouvernement avait décidé de s’établir avec le quartier général à Rachka, en pleine montagne, au cœur de la Serbie historique ; M. Pachitch pensait que l’on pourrait séjourner là quelque temps ; les dernières nouvelles qu’il avait reçues des Alliés lui donnaient, en effet, une lueur d’espoir : les Russes massant des troupes sur la frontière roumaine et annonçant l’intention d’attaquer la Bulgarie ; les Franco-Anglais commençant leur offensive dans la vallée du Vardar. Avec leur optimisme habituel, les Serbes voyaient déjà Uskub dégagée.


Le 31 octobre, de bon matin, on partit en automobile pour Rachka. Mais ce petit village de six cents habitans ne pouvait abriter à la fois l’état-major général, pour lequel il ne fallait pas moins de cent vingt chambres, le Gouvernement et les représentans des quatre Puissances alliées ; ces derniers, après une nuit de repos à Rachka, devaient donc continuer le voyage jusqu’à Mitrowitza ; l’ancien ministre à Sofia, M. Tcholak-Antitch, les y accompagnerait pour établir la liaison avec le Gouvernement.

La route en corniche longeait le cours de l’Ibar ; on était sous le charme de ce paysage pittoresque, mais une automobile plus rapide rappelait à la réalité ; c’est, en effet, l’un des ministres qui se hâtait vers Rachka. Successivement, M. Pachitch et ses collègues nous dépassèrent ainsi. A une montée difficile, un camion en panne arrête longtemps quelques automobiles. On cause en attendant que la réparation soit terminée, et le ministre des Travaux publics, M. Drachkovitch, dit son espoir de voir bientôt Uskub dégagée grâce aux Alliés, et si cet heureux événement ne se réalisait pas, la ferme volonté du Gouvernement de lutter jusqu’aux dernières limites de la résistance, en se retirant par l’Albanie vers Monastir pour donner la main aux Alliés.