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toujours bien faible et Pierlot[1], qui arrive de Paris, m’a dit que dimanche dernier, au dîner de l’Empereur, elle s’était trouvée mal. Heureusement, mes inquiétudes ont été aujourd’hui dissipées ; je sais qu’elle va mieux. Adieu, mon cher Eugène, tu connais toute ma tendresse pour toi. J’embrasse tendrement Auguste et la famille.

« JOSEPHINE.

« Je désirerais bien avoir, mon cher Eugène, des crêpes de Bologne. Tu serais aimable de m’en envoyer de blancs et de couleur. Ils sont plus beaux qu’en France. »


L’Impératrice reste à Navarre jusqu’au 3 septembre. « L’approche de l’automne m’a engagée à quitter Navarre, » écrit-elle le 5 à Hortense. Elle vient de recevoir une lettre de l’Empereur, en date de Trianon le 20 août, où elle a lu : « Mets de l’ordre dans tes affaires. Ne dépense que 1 500 000 francs et mets de côté tous les ans autant : cela fera une réserve de quinze millions en dix ans pour tes petits-enfans ; il est doux de pouvoir leur donner quelque chose et de leur être utile. Au lieu de cela, on m’a dit que tu as des dettes, cela serait bien vilain. Occupe-toi de tes affaires et ne donne pas à qui en veut prendre. Si tu veux me plaire, fais que je sache que tu as un gros trésor. Juge combien j’aurais mauvaise opinion de toi si je te savais endettée avec trois millions de revenu. » Cela va faire l’objet principal de la lettre suivante :


A Malmaison, ce 25 septembre (1811).

« J’ai reçu ta lettre du 16, mon cher Eugène. Je sens avec quel plaisir Hortense se sera mise en route pour les îles Borromées[2]. Il m’eût été bien doux de l’accompagner dans ce petit voyage, mais j’espère que mon tour arrivera, et je compte partir à la fin d’octobre, à moins que ma santé ne s’y oppose. Je ne suis pas bien portante depuis trois mois. Je ne sais pas si c’est l’air de Navarre où nous avons été tous plus ou moins malades.

  1. Louis Pierlot, receveur général de l’Aube, nommé intendant général par décret du 1er janvier 1810, démissionnaire en juin 1811, mort en 1826.
  2. Ce voyage avait passé inaperçu, au milieu des divers déplacemens de la Reine en 1811. Dans une lettre à Mme de Boucheporn, gouvernante de ses enfans, en date de Genève du 14 septembre (1811), Hortense dit : « Je vais faire un petit voyage pour voir mon frère ; je serai de retour du 10 au 15 octobre. »