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Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 37.djvu/241

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retour ou le déchaînement d’un conflit similaire dans l’avenir, de façon à pouvoir comparer ensemble en toute franchise leurs déclarations. » Cette traduction est bien lourde : il suffit qu’elle soit fidèle. M. Wilson est las d’en être « réduit à des conjectures, » de ne pas mieux savoir « pour quel objet concret le conflit a été engagé. » Il en est las comme homme et comme président des États-Unis; mais ceux-là qui l’ont engagé, c’est auprès d’eux qu’il lui convient de se renseigner. S’il peut le leur faire confesser, nous serons tout les premiers fort aises de l’apprendre. « Un sondage, » dit-il; sa note ne vise pas au-delà. Pour nous, qui ne sommes ni ténèbres ni abime, il ne sera pas difficile de nous sonder. Nos buts de guerre sont lumineux : des réparations, des restitutions, des garanties. Aveugle qui ne les voit point. Ennemi de lui-même, et de son pays, et de tous les pays, de tous les hommes nés ou à naître, qui s’interposerait entre nous et ces « buts de guerre, » lesquels ne sont que les fondemens nécessaires d’une paix durable. Ennemi de la paix, qui hâterait une paix bâclée et boiteuse. Le président Wilson en est très convaincu; et c’est pourquoi, insiste-t-il, « il ne propose pas la paix, il n’offre même pas une médiation. »

Il n’y a donc pas, de la part des États-Unis, ombre de médiation s’il n’y a, de la part de l’Allemagne, qu’ombre de propositions de paix. Personne, en réalité, ne nous offre rien que de nous offrir, ou, pour être plus exact encore, l’Allemagne ne nous fait offrir que de demander. Notre conduite est par-là même toute tracée. Là où il n’y a rien, le Roi, l’Empereur lui-même perd ses droits, et son chancelier perd son temps. Quand on n’est en présence de rien, ne disons pas qu’on l’écarte par une fin de non-recevoir; car il n’y a pas lieu de recevoir ni d’écarter ce qui n’existe pas. Tout ce qu’on peut faire, c’est d’attendre que l’on soit mis en présence de quelque chose. C’est là, si j’ose employer cette image familière, comme l’amorce d’un entretien téléphonique : « Nous écoutons. — Mais non, parlez. — Pardon, c’est vous qui avez appelé. » Coupons tout de suite la communication. Si l’on tient à « causer, » on nous rappellera.

Nous, nous ne bougerons pas, parce que la paix que nous voulons, ce n’est pas la paix allemande, c’est la nôtre et que l’heure ne nous en parait pas encore venue. Il n’est, pour nous décider en pareille matière, que de nous représenter nettement notre situation et celle de l’ennemi. A l’acte du chancelier, il y a naturellement des prétextes et des raisons. Comme prétextes, nous apercevons, sans peine, tous ceux qu’il a énumérés : l’Allemagne victorieuse,