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qui furent faites, des engagemens qui furent pris et qui ne pourraient être éludés, sans qu’une tache en rejaillît jusqu’aux étoiles du pavillon américain ? Aussi la dernière note du Président, la note du 18 décembre, qui s’adressait aux belligérans et aux neutres, eût-elle été plus intelligible pour nous, si d’abord on l’eût rapprochée en pensée de la précédente, si ensuite on ne l’eût pas séparée du commentaire du secrétaire d’État, M. Lansing. M. Lansing avait comme laissé échapper, ces mots terribles : « Nous sommes au bord de la guerre; » puis, aussitôt, il s’était baissé pour les rattraper ; mais on ne rattrape jamais plus les mots qui se sont échappés. De l’explication, ou plutôt des deux explications successives, presque concomitantes, mais contradictoires, du secrétaire d’État de M. Wilson, c’est justice et prudence de retenir même et surtout ce qu’il en a voulu reprendre. Mais une question en découle, nécessaire et pressante : Qui donc, et qu’est-ce qui mettait ainsi les États Unis « au bord de la guerre ? » Et ce chemin encore, comme tous les chemins de la perfidie et de la violence, mène à Berlin. Mais le reste des neutres, les petits neutres, autour du plus grand d’entre eux, qui les sollicite, qui les agite dans le même instant, pour les pousser dans le même sens, vers le même acte ? Qui continuera, après le 12 décembre, après le 18 décembre, à annoncer leur intervention ; qui s’obstinera à leur faire faire ce pas, en répandant partout la fausse nouvelle qu’ils l’ont fait ? Et, le coup manqué, ce coup qu’au pays de Machiavel on a qualifié de « méphistophélique, » qui s’est efforcé de le rejeter sur d’autres, qui s’est enfui, en criant, selon la coutume, au voleur ? Qui donc a dit : « C’est l’Angleterre ? » — L’Allemagne, l’Empereur allemand, le Chancelier allemand, la diplomatie allemande, la presse allemande. De l’autre côté de l’Océan, M. Wilson a cru d’une foi parfaite agir, il a agi, en volonté, librement et spontanément; néanmoins, il était « agi » sans s’en douter : de l’autre côté de l’Océan comme de celui-ci, l’Allemagne avait sournoisement, infernalement travaillé à créer le milieu qu’il lui fallait, dans le moment où il le lui fallait.

Le jour cru, le franc soleil, a eu vite fait de dissiper les prestiges de cette espèce de « Nuit du Walpurgis » diplomatique. A partir du 18 décembre, et jusqu’à la réponse de l’Entente à la note des Impériaux, la note américaine a déroulé logiquement ses conséquences, qui, elles aussi, étaient conditionnées, commandées par les circonstances, par le milieu et le moment. Le 22 décembre, à son tour, le Conseil fédéral suisse faisait remettre aux gouvernemens des États belligérans une note, corollaire, en quelque sorte, de celle du