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l’Amirauté anglaise s’est résolue à modifier ses méthodes expectantes et à barrer les approches du « fort » de la flotte ennemie par des lignes de mines et de filets, dont on espère qu’elles retiendront les submersibles allemands dans le camp retranché maritime que je définissais tout à l’heure. Et c’est bien là, je le répète, une opération de la guerre de côtes.

Quoi qu’il en soit, et comme il est impossible d’admettre que les Allemands ne fassent pas efforts sur efforts pour vaincre l’obstacle que les Anglais opposent à la sortie de leurs sous-marins[1], on est rigoureusement conduit à l’hypothèse d’actions navales engagées dans les eaux peu profondes et à petite distance du littoral. Les canons de côte allemands pourront-ils intervenir, du moins, dans ces combats analogues à ceux qui se sont déroulés, il y a dix-sept mois, à l’entrée du golfe de Riga ? Peut-être pas du côté du Jutland, mais probablement du côté de la Hollande, car la « portière » du barrage ne sera point sans doute à plus d’une dizaine de milles des ouvrages de la première île allemande de la Frise orientale, Borkum. Il y a là certainement des pièces dont la portée dépasse, sous les grands angles, vingt-cinq kilomètres et dont la justesse, à cette distance, est encore suffisante. Quant aux moyens d’observation et de réglage du tir, on sait à quoi l’on arrive maintenant avec les avions. D’ailleurs, deux grands phares s’élèvent sur l’île, d’où des observateurs exercés pourraient donner toutes indications utiles… jusqu’au moment où ces observatoires recevraient à leur tour des projectiles venant de la mer.

Eh bien ! puisque la guerre sous-marine si vigoureusement instaurée par l’Allemagne nous a conduits, — tardivement, — au seuil de la guerre de côtes, examinons quelles doivent être les caractéristiques de cette guerre, quels engins y peuvent employer le défenseur et l’assaillant et enfin quel succès on peut attendre, de part et d’autre, de la mise en jeu de ces moyens d’action.


Si je pouvais me permettre de faire ici de l’humour facile, je dirais que l’essentielle caractéristique de la guerre de côtes, au moment où nous sommes, c’est l’appréhension qu’elle

  1. Je suppose implicitement que des mesures seront prises par l’Amirauté anglaise pour empêcher la sortie des sous-marins allemands par le Sund, ou même par le petit Bell, où l’Allemagne, riveraine du côté occidental du détroit, ne manquera pas de relever les mines pour les laisser passer.