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verres, si intéressans que fussent ceux-ci, il n’eût pas eu le même succès. Mais il se préoccupa de remplacer le travail individuel par la production mécanique et en série, qui permet seule, par l’étendue des bénéfices, le développement d’un outillage industriel stable. Au lieu d’en rester au stade un peu médiéval où stagnaient les industries du verre avec des petits groupes d’ouvriers habiles produisant de coûteux chefs-d’œuvre, il amplifia la production par des procédés où l’habileté professionnelle de l’opérateur devenait secondaire. Ici encore nous avons assisté à la lutte de la quantité contre la qualité dont un éminent publiciste italien nous entretenait naguère à tout autre propos.

En même temps, et comme corollaires il développait ces moyens de propagande commerciaux qui ont tant fait dans le monde pour l’expansion des produits allemands : voyageurs de commerce polyglottes s’enquérant des goûts et des besoins des cliens au lieu de vouloir leur imposer des produits uniformes, catalogues magnifiques rédigés dans les langues des pays à conquérir, etc. Il y faut ajouter les facilités que, sous forme de subventions industrielles, de primes d’exportation, etc., le gouvernement allemand ne marchandait pas à ses sujets.

Dans tous les ordres d’idées, il y a beaucoup à faire chez nous, dans le dernier surtout. Pour n’en prendre qu’un exemple, étranger d’ailleurs à l’optique, sait-on pourquoi l’industrie horlogère française, pour laquelle cependant nous sommes si admirablement doués, n’arrive pas à concurrencer à l’étranger l’horlogerie suisse, et par une conséquence immédiate n’arrive même pas à développer ses moyens de production jusqu’à pouvoir lui résister sur notre propre marché ? C’est à cause de je ne sais quels règlemens antédiluviens qui interdisent pour la France les bijoux d’or au-dessous d’un certain titre (ce qui est légitime) mais qui par surcroît entourent la sortie pour l’exportation et la rentrée des bijoux de titre inférieur dans les pays où ils sont autorisés, d’un tel réseau barbelé de formalités et de chinoiseries que cette exportation est pratiquement impossible. Les pires ennemis de la prospérité du pays, ce sont souvent des « règlemens, » c’est-à-dire des textes, datant généralement du temps des diligences, et on ne sait pourquoi intangibles.


Mais déjà nous pouvons apercevoir des signes joyeux et réconfortans d’une rénovation industrielle qui, — en cela à coup sûr la