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fut le discours qu’il prononça en 1908 à Rome au Congrès des Mathématiciens sur les origines, les méthodes et les problèmes de la géométrie infinitésimale. Darboux a maintes fois regretté la tendance qu’ont trop de savans français à se désintéresser de l’histoire des sciences ; il savait quelles difficultés on y rencontre et avec quelle peine on arrive à rétablir des droits depuis longtemps méconnus. Aussi poussait-il vivement ses nouveaux confrères à écrire sur leurs prédécesseurs des notices qui fussent des documents pour l’histoire de la science française. Il avait en effet le souci de voir rendre à chacun des pionniers de la science la justice qui lui est due, et n’ignorait pas combien l’histoire peut, entre certaines mains, être étrangement défigurée.

Ce fut, pour Darboux, une grande satisfaction que de pouvoir réaliser un projet qu’il caressait depuis longtemps : l’impression des procès-verbaux, restés manuscrits, des séances de l’Académie des Sciences, depuis la fondation de l’Institut en l’an IV jusqu’à l’année 1835, où a été inaugurée la publication des Comptes Rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des Sciences. Le recueil des procès-verbaux en est aujourd’hui à son cinquième volume, qui va de 1812 à 1815. Les historiens de l’avenir y trouveront les textes lus plus précieux pour une époque où l’Académie comptait des hommes tels que Lagrange, Laplace, Monge, Cuvier, Lamarck, pour ne citer que quelques noms.


Au milieu de tant de travaux et d’occupations variées, Darboux a encore voulu donner une part de son temps à des œuvres plus discrètes qui demandaient un véritable dévouement. Il a présidé pendant dix-sept ans la Société des Amis des Sciences. Celle-ci, fondée en 1857 par le baron Thénard, a un but singulièrement élevé : c’est une Société de secours, mais où les titres à invoquer sont des services rendus aux sciences pures et appliquées, à l’industrie et à l’agriculture. Darboux a beaucoup contribué à son développement ; il rêvait d’une grande œuvre de solidarité scientifique, où ceux, et ils sont légion, qui profitent des progrès et des découvertes de la science, viendraient tous en aide aux chercheurs, uniquement préoccupés de leurs travaux, insoucians de l’avenir pour eux et pour ceux qui les entourent. Ses appels émus ont été souvent