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démocratie dans la guerre et dans la paix, beaucoup à dire, et il n’en faut pas trop dire. Ce qu’il y a de hautement significatif, en même temps que d’incontestablement nouveau, c’est la volonté, déclarée par les onze Puissances maintenant parties en croisade contre l’Allemagne, de punir ses crimes et leurs auteurs, de l’en châtier collectivement et de les en châtier personnellement. Si cette épouvantable et exécrable guerre aboutissait à établir une sanction pénale du droit international et à l’exécuter, malgré les torrens de sang et de pleurs qu’elle aura fait répandre, elle se solderait par un bienfait ; nous aurions fait alors un de ces petits pas par quoi se mesure, misérablement, le progrès à travers les âges.

L’intervention des États-Unis, sous ces divers rapports, est avant tout chargée de sens moral, mais il convient de n’en point rabaisser l’importance, même matérielle. Ce que la République américaine met à la disposition de l’Entente, ce sont toutes ses forces et toutes ses ressources, aux termes mêmes de la résolution, adoptée au Sénat par 82 voix contre 6, à la Chambre des représentans par 373 contre 50, et ratifiée, au préalable, par l’acclamation populaire. Et ce sont des forces et des ressources immenses; une richesse sans fond, une production ou une productivité sans fin, une très grande puissance navale, une puissance militaire qui, faible encore en raison des circonstances de l’histoire et de la géographie américaines, peut se développer très rapidement. Dix mille soldats américains sur les champs de bataille de l’Europe ne seraient évidemment qu’un symbole; et cinq cent mille même ne seraient qu’un appoint; mais quinze milliards en or dans les caisses de l’Union, à la quatrième année de guerre, et l’afflux du fer, aussi précieux que l’or, et le blé, aussi nécessaire que l’or et le fer, c’est la victoire. La victoire totale, avec les réparations, les expiations et les garanties. L’Allemagne impériale, condamnée par la Haute-Cour des nations, n’esquivera pas une sentence que le monde entier a prononcée. C’est écrit. Securus judicat orbis terrarum.


CHARLES BENOIST.

Le Directeur-Gérant, RENE DOUMIC.