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Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 39.djvu/673

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modifié profondément des mentalités dont le trait caractéristique (en soi, fort honorable) est le respect, poussé jusqu’au dernier scrupule, de la liberté, des droits des petites nations… « des petits pays indépendans, » dit-on officiellement, sans s’apercevoir, ou plutôt sans vouloir dire qu’en fait, ces petits pays ne sont plus indépendans, mais vassaux de l’Allemagne.

Eh bien ! donc, encore un coup, que veut-on faire ?

D’abord, étendre et perfectionner le système des consignations et des contingens[1], en ce qui touche les neutres du Nord (c’est déjà fait et bien fait, semble-t-il, en ce qui concerne la Suisse),. Ensuite, recourir à la politique d’achats, c’est-à-dire, « sans violenter les neutres. » leur demander de nous donner la préférence sur les Allemands quand il s’agit pour eux de vendre et d’exporter les produits de leur propre sol.

Rien à dire sur le premier point, sinon que la fixation des chiffres du contingentement en Hollande et en Danemark sera toujours très difficile, si l’on veut que cette opération soit réellement favorable aux intérêts généraux de l’Entente. Je veux bien que les négocians alliés dont je parlais tout à l’heure consentent enfin à ne pas exporter chez les limitrophes de l’Allemagne des stocks de denrées et de matières qu’ils savent bien qu’on fait passer à nos ennemis. Il suffit d’ailleurs que les gouvernemens cessent de fermer les yeux sur ces extraordinaires pratiques Mais conçoit-on les Hollandais et les Danois eux-mêmes se piquant à l’envi de ne demander que ce qui leur est strictement nécessaire et s’interdisant ainsi des bénéfices considérables, si considérables que leur conscience les absout sans peine d’entretenir la guerre et de favoriser l’iniquité ? Il ne faut pas trop demander aux hommes !

M’objectera-t-on qu’on ne s’en fie pas seulement aux déclarations qu’ils peuvent faire de leurs besoins et que l’on se sert contre eux de leurs propres statistiques d’importations avant la guerre ? Hé ! que de raisons, que d’argumens victorieux ne produiront-ils pas contre une méthode si rigoureuse ! J’en ai cité des exemples, le 15 février 1916, et les preuves abondent.

  1. « Avant de donner une autorisation de sortie pour une marchandise à destination d’un neutre limitrophe de l’Allemagne, nous exigeons que cette marchandise soit consignée à une société de surveillance et qu’elle soit contenue comme quantité, dans les limites d’un contingent calculé sur le montant nécessaire à la consommation intérieure de chaque pays… » (Discours de M. Denys Cochin.)