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passions elles-mêmes, éclairées par leur domination, nous poussent, par lassitude, à des instincts de règle… C’est une heure bénie entre les autres, l’heure où nous entrons dans l’ordre. » Dans la vie esthétique elle-même, ce temps arrive et cette heure sonne. L’ordre, la discipline et la raison, l’éclat, avec la fermeté et la droiture, voilà ce dont est faite l’œuvre d’un Clementi, et, plus haut encore que cette œuvre, la loi qui la gouverne, la loi de l’esprit ou du génie classique, la règle par excellence, « la règle d’or. »

Wyzewa l’estimait précieuse et salutaire entre toutes. Une dernière fois, il en a signalé, dans une œuvre musicale insigne, et la bienfaisance et le prix. « J’ai mis, nous écrivait-il, mon cœur entier à préparer ce recueil. » Aussi bien, avec le désintéressement qui fut une de ses vertus, il ne vit jamais là, selon ses propres expressions encore, qu’ « un ouvrage de pure piété musicale. « Il avait bien voulu nous y associer. Pour lui, chez lui, que de fois nous avons joué, — sur quel misérable piano ! — les chefs-d’œuvre qui le ravissaient, malgré l’indignité de l’instrument et de l’interprète ! Il aimait, disait-il en souriant, à nous « commettre le soin de leur gloire. « Sensible à cet honneur, il nous plaît d’envelopper dans un mémorial unique l’hommage de notre admiration pour un grand musicien et le souvenir et le regret de l’ami qui nous l’a révélé. Cette édition de Clementi fut en quelque sorte le testament de Teodor de Wyzewa. Nous n’avons souhaité que d’en être l’exécuteur fidèle et pieux.


CAMILLE BELLAIGUE.