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cherché, en ceci ou en cela, quelque prétexte à les diminuer. Ils ont soigneusement marqué ce point pour l’heure des justes rétributions, où il sera donné à chacun selon ses œuvres, sans méconnaître, au surplus, l’aide que leur a apportée la coopération des alliés, notamment par le concours de batteries de l’artillerie lourde britannique.

Cette coopération vient de s’affirmer de nouveau, avec non moins d’évidence, sur le front de Macédoine ou de Salonique, ou plutôt sur les deux fronts de Macédoine et de Salonique, front de terre et front de mer. En effet, tandis qu’une escadrille franco-anglaise d’aviation bombardait les positions turques de Cavalla et de Dédé Agatch, les navires de l’Entente participaient indirectement à l’une des attaques en prenant sous leur feu les communications ennemies. À l’intérieur, en Macédoine même, dans la boucle de la Cerna, aux alentours du lac Doiran, à l’Ouest du Vardar, une grande activité de toutes armes s’est éveillée. Les Impériaux en casque et en turban s’inquiètent des moyens et des desseins du général Sarrail, auquel ils recommencent, en paroles du moins, à opposer leur homme-volant, leur général ubiquiste, Mackensen. Ces inquiétudes montrent clairement qu’ils ne considèrent pas du tout le front balkanique comme secondaire, et, de fait, la rupture d’équilibre pourrait se produire n’importe où. La saison est propice, et il dépend beaucoup des hommes que les dieux le soient ou le deviennent. Jusqu’ici l’armée de Salonique a été paralysée, parce qu’elle n’a pas pu s’appuyer sur sa base naturelle, la Grèce. Deux ans de tâtonnemens et d’erreurs ont empêché de tirer d’une idée juste et hardie ce qu’elle contenait ; l’incertitude, les hésitations, les contradictions des gouvernemens de l’Entente, ont fait un point d’arrivée de Salonique, qui ne devait être qu’un point de départ, mais qui ne pouvait l’être que sous de certaines conditions. À cette politique flasque et molle a correspondu ce qu’on appelle plaisamment, à Rome, la politique « turlupinatrice » du gouvernement d’Athènes ; et le mot n’est pas commode à traluire. mais il n’y a qu’à remonter à la racine pour deviner. C’est en juger sans bienveillance, assurément, mais avec une clairvoyance parfaite. L’instant présent, l’occasion présente, sont le dernier instant, la dernière occasion qui s’offrent à nous de rompre ces enchantemens. Si nous savons le faire, nous ne tarderons pas à être récompensés d’une résolution dont les conséquences seront telles qu’elles nous étonneront. Et si nous ne savons pas le faire, mieux vaut peser le plus tôt possible ce que coûte, ce qu’exige l’expédition de Salonique,