droiture d’esprit, ce zèle de l’idéal, et c’est pourquoi nos âmes de vingt ans s’attachaient à la sienne [1].
La spontanéité de l’entrain, les merveilleuses vertus d’entraînement survivaient à la leçon, et poussaient le professeur, ensuite, vers les ateliers de recherches où ses collègues défrichaient, chacun à part des autres, un petit coin du terrain scientifique ; il s’attardait avec une prédilection spéciale chez le neurologiste Van Gehuchten ; et tout humblement, dans ces studieuses promenades, il prenait posture d’apprenti, en descendant de la chaire où il avait fait la besogne d’un maître.
De loin, Léon XIII l’observait : il lui donnait en 1886 une prélature romaine. Il contemplait avec amour le magnifique labeur de ce pionnier, qui, là-bas, d’un geste audacieusement solitaire, jetait le pont entre les spéculations du Moyen-âge et les méthodes d’observation les plus modernes. Et peu à peu le Pape réfléchissait que, pour faire de la philosophie la synthèse des sciences, il fallait plus qu’un homme, — cet homme fût-il Mercier, — et qu’il fallait plus qu’une chaire : qu’il fallait un Institut, pourvu de chaires spéciales où l’on s’appliquerait à « façonner des jeunes gens d’élite à la science haute et désintéressée. » Deux brefs pontificaux, en 1888 et 1889, développaient ces perspectives, et ces perspectives étaient des ordres.
En 1891, dans son rapport au Congrès de Malines, Mgr Mercier les commentait. Il y montrait le champ de la science, le recul constant de ses limites, l’urgente nécessité d’une main-d’œuvre catholique. « Vous vous résignez trop facilement, signifiait-il aux catholiques, au rôle secondaire d’adeptes de la science, et trop peu parmi vous ont l’ambition de travailler à ce que l’on a nommé la science à faire ; trop peu parmi vous visent à rassembler et à façonner les matériaux qui doivent servir à former dans l’avenir la synthèse rajeunie de la science et de la philosophie chrétienne [2]. » Il voulait les entraîner vers la science pure, cultivée pour elle-même, sans but professionnel, sans but apologétique direct ; il voulait qu’ils fussent les chercheurs, dont ensuite la philosophie ordonnancerait les