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Réponse :

« Prince, rien ne me serait plus agréable que de correspondre avec Votre Altesse sur tout autre point que celui qui fait l’objet de ces lettres. Ma résolution étant inébranlable, ma réponse à sa lettre particulière ne peut être que conforme à celle faite à sa lettre officielle. J’ai la confiance que Votre Altesse l’approuvera, comme étant celle qu’elle prendrait dans une pareille circonstance. »

Tandis qu’avaient lieu ces pourparlers où se révèle le caractère indomptable et chevaleresque des guerriers français de cette période héroïque de notre histoire, des combats sanglans continuaient à se livrer aux alentours de la place, de plus en plus étroitement investie. C’est en vain que l’ennemi trouve moyen de faire pénétrer dans Sarrelouis des lettres et des paquets de journaux destinés à démoraliser la population et à lui faire connaître les événemens qui avaient bouleversé la France et restauré la royauté. Les Sarrelouisiens demeurent inébranlables dans leur résolution de combattre pour garder la place jusqu’à ce qu’un ordre formel du Gouvernement français vienne leur enjoindre d’ouvrir leurs portes : ils se refusent à négocier avec l’ennemi.

Cet ordre fut enfin, hélas ! envoyé de Paris par le ministre de la Guerre, le 27 novembre : ce fut comme un arrêt de mort pour les défenseurs de la place. En même temps, le maire de Sarrelouis recevait, consterné, du ministre de l’Intérieur, la lettre suivante :


Paris, le 26 novembre 1815.

« Monsieur le maire, vous connaissez sans doute le traité de paix conclu à Paris entre le Roi et les Puissances alliées… Par ce traité, la France cède quatre places aux Alliés : votre ville est une de ces places. Je remplis, Monsieur, un devoir bien douloureux, en vous priant de préparer vos concitoyens au triste sacrifice qu’ils sont forcés de faire. Le Roi m’ordonne de vous dire quelle a été sa profonde affliction quand il a vu qu’une impérieuse nécessité le contraignait à vous séparer de sa grande famille… De tous les maux dont la trahison vient d’accabler Sa Majesté, il n’en est pas de plus dur pour Elle que l’ordre qu’Elle me donne aujourd’hui. Le lien qui vous unissait à la France est rompu ; l’affection de Sa Majesté pour vous subsistera